Par Stéphane Oiry et Trap. Delcourt, 9,95 €, le 4 novembre 2009.

Riche idée de reprendre les personnages de Louis Forton, ces filous inventifs au langage fleuri. Voilà donc Croquignol, Filochard et Ribouldingue dans un Paris en pénurie de logement et une France en temps de crise. Toujours prêts à abuser les bobos, ils finissent par devenir – malgré eux – les porte-étendards des mal-logés devant la municipalité. La politique étant souvent affaire de tchatche et de coups tordus, les voilà plus qu’à l’aise !

Mettre en scène des héros escrocs (et un peu justiciers quand même), en ces temps de politiquement correct, est une excellente idée. Et qui de mieux que les fameux Pieds Nickelés, SDF contestataires et plein de bon sens (et d’un peu de mauvaises intentions), pour mettre le doigt sur les problèmes de société actuelle ? Trap et Stéphane Oiry s’amusent comme des petits fous à donner un lustre d’antan à leurs personnages, avec une verve toute en jeu de mots et contrepèteries, et des dessins tramés et une mise en couleurs sobre pour la patine vintage. Le récit est dynamique, les dialogues savoureux (« Un bon chez-soi vaut mieux que deux tentes Quechua ») et ce court album de 32 pages se déguste avec un réel plaisir. Comme un bon apéro, on aimerait qu’il ne finisse pas. Toutefois, le côté nostalgique des personnages, savamment entretenu, est en total décalage avec le l’époque contemporaine décrite. Ce qui amène à se demander si cette faille temporelle ne nuira pas à terme à la série, car confronter des personnages créés il y a un siècle à des problématiques d’aujourd’hui peut s’avérer risqué. Enfin, ce premier tome réussi, on croise les doigts pour le suivant.

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