La Petite Couronne
En banlieue comme ailleurs, y’a des papas qui font les courses, vont chercher les enfants à l’école, les emmène au sport et leur font prendre la douche. Parfois, quand ils ont un moment, ils se retrouvent sur un banc, devant l’épicerie arabe du coin ou en bas d’une tour, pour discuter. Bon, ils en ont pas mal, des moments, vu qu’ils ne bossent pas. Mais ça ne les empêchent pas d’avoir envie d’une vie meilleure, là où ils vivent.
Sujet plombant la banlieue ? Pas du tout. Sous le crayon de Gilles Rochier, elle est tout simplement vivante, authentique. L’auteur de TMLP et La Cicatrice choisit ici un angle et un procédé particuliers : des saynètes en une ou deux planches, voire une illustration et un dialogue en off, pour décrire des bouts du quotidien de trois habitants du quartier quand ils se croisent à l’extérieur. Jamais on ne verra leur réalité familiale : dehors, ces copains jouent un rôle, font les fiers, les malins, les costauds, mais très vite ils se dévoilent comme des gens normaux, un peu glandeurs mais débrouillards, peu cultivés mais attentifs aux autres, conscients de leur situation peu glorieuse mais honnêtes et humains. De vrais héros de buddy movie, à qui ils n’arrivent jamais rien. Avec un dessin tout en petits traits nerveux, dans un registre plutôt humoristique, soutenu par une bichromie beige discrète, Gilles Rochier compose un petit théâtre d’au-delà du périph’ très convaincant. À la fois touchant et hilarant. Surtout, il ne tombe pas dans les clichés sur la banlieue, et même en joue avec bonheur. Et ça, c’est rare.
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