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La richesse selon Daniel Blancou

17 mars 2010 |

blancou_introPetit à petit, Daniel Blancou fait son bonhomme de chemin dans le petit monde de la bande dessinée. Diplômé des Arts Déco de Strasbourg, dans la même promo que Boulet, Lisa Mandel ou Erwan Surcouf, cet auteur discret de 33 ans vient de sortir un livre au titre lumineux : Être riche. Dans le même esprit que son malin Albert le magnifique, il pousse la société du « travailler plus pour gagner plus » jusqu’à l’absurde, et réfléchit à la définition même de la nature humaine. Le héros de son nouvel album fait ainsi fortune en vendant ses objets personnels aux enchères, objets qui atteignent des sommes folles en fonction de leur valeur affective. Fort de cette embellie, le nouveau riche va jusqu’à vendre sa femme et son fils ! Entre philosophie politique et regard drolatique sur le monde moderne, ce one-shot au graphisme nostalgique emballe par son originalité et sa pertinence. Entretien avec un Daniel Blancou qui confesse être un mauvais client en interview, mais qui accepte d’essayer de se vendre pour BoDoï.

blancou_bonheurD’où est venue l’idée de Être riche ?
Si j’avais une seule réponse à cette question, j’aurais un point de vue unique à délivrer et je n’aurais pas fait une bande dessinée, mais plutôt un livre… Pour moi, la fiction est le meilleur moyen de réfléchir à quelque chose, sans imposer un point de vue définitif. Mon album vient donc de questions que je me pose, de choses que j’entends, qui me choquent ou m’interpellent. Notamment ces riches qui se posent des problèmes de riches et qui s’expriment dans les médias. Une fois, j’en ai entendu un parler des personnes qu’il considérait comme « pauvres », alors qu’elles étaient encore bien plus riches que moi !

blancou_juniorCes paroles vous ont inspiré pour votre voix off qui est très cynique…
Oui. J’ai souvent l’impression d’écrire des horreurs, alors que la réalité est bien pire. On entend à longueur de journées des phrases terribles, mais on n’y fait plus attention. J’en ai reprises certaines dans ma voix off, et c’est vrai que mises bout à bout elles sont effrayantes ! Mais j’ai pris plaisir à écrire le texte de ce narrateur qui délivre un discours totalement opposé à ce que je pense.

Comme dans Albert le magnifique, vous abordez la question de ce qui définit un homme aujourd’hui. Êtes-vous conscient de faire de la BD philosophique ?
Philosophique, je ne sais pas. Politique, peut-être, au sens premier, puisque je m’intéresse à la société et aux hommes. Je vais paraître prétentieux, mais j’essaie sincèrement de faire de la bande dessinée intelligente. Quand on fait un livre, il faut absolument savoir pourquoi on le fait, être pleinement conscient de son but. Quand on raconte une bonne blague ou qu’on met en scène une histoire émouvante, c’est la même chose.

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Qu’est-ce qui vous a inspiré l’idée de votre héros – qui vend ses objets personnels un prix exorbitant ?
Le fait que beaucoup de gens adorent faire les puces et acheter des objets à l’esthétique rétro ou populaire, voire kitsch, et ce à prix fort. C’est bizarre… Du coup, ce qu’on trouve chez Emmaüs devient très cher ! Dans mon histoire, j’ai poussé le vraisemblable jusqu’à l’absurde.

blancou_valeurVous utilisez un graphisme très sobre et teinté de nostalgie…
Oui, j’essaie de simplifier un maximum ce que j’ai à dire et donc de produire un dessin accessible et clair. J’essaie d’éviter d’être flou, de simplifier ma façon de raconter, afin de pouvoir glisser de petites choses complexes sans alourdir l’ensemble. Ensuite, le côté nostalgique de mon dessin et de mes couleurs remonte tout seul à la surface, sans que j’y fasse attention. Et ce depuis toujours ! Je ne travaille pas avec, sur les genoux, les BD que je lisais quand j’étais petit, mais leur influence rejaillit de toute manière…

Votre travail dans la revue Lapin de L’Association est très différent.
Tout l’intérêt de publier dans Lapin, c’est qu’on peut y tenter ce qu’on ne peut pas faire ailleurs. C’est très important pour moi d’explorer des pistes que je pourrais utiliser plus tard dans mes albums grand public. Expérimentation et narration plus classique doivent à un moment se rejoindre, sinon ça n’a pas de sens.

blancou_couvEt que pensez-vous de l’émergence de la bande dessinée numérique ?
S’il s’agit d’un projet conçu pour une diffusion numérique, je trouve ça très bien. L’adaptation de bouquins pour téléphones, en revanche, pas vraiment. Aujourd’hui, la BD numérique est plus un sujet économique que créatif. Les choses vont changer quand les auteurs vont se lancer seuls dans l’aventure, comme a pu le faire Lewis Trondheim avec Bludzee, ou les auteurs participant aux Autres Gens.

Quels sont vos projets ?
Je travaille sur une bande dessinée témoignage sur les camps de Harkis, pour la collection Shampooing. C’est un projet énorme, qui nécessite beaucoup de documentation, mais qui va me faire sortir de mon atelier ! J’en ai pour au moins deux ans, mais je pense que je ferai d’autres choses entre temps. Une fiction pour enfants peut-être. Ou quelque chose sur la vidéosurveillance, les puces RFID… Mais je n’en ai pas encore parlé à mon éditeur !

Propos recueillis par Benjamin Roure

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Être riche.
Par Daniel Blancou.
Sarbacane, 16,50 €, le 3 mars 2010.

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