La Sémantique, c’est élastique
La sémantique, ou l’étude du sens des mots. « Élastique », parce que comme nous l’explique patiemment le narrateur, les mots ont certes un sens, mais on peut aussi leur faire dire bien des choses à leur corps défendant. Et pour ne pas se faire enfumer par leur pouvoir parfois mystificateur, un peu d’étymologie old school, et autres subtilités philologiques de « grammar nazi » ne sont pas de trop. On y apprend par exemple que la langue française s’est « masculinisée » de manière forcée sous la férule de l’Académie, ou que l’origine géographique de la dinde souffre d’une confusion terrible dans le monde entier.
Problème : comment rendre dynamique en BD un sujet aussi abstrait et présumé ringard ? Le dessinateur et scénariste James (Amour, Passion et CX Diesel, Dans mon open space, À la Folie), qu’on voit rarement en solo, s’est attelé pour La Revue Dessinée à ce défi périlleux, dans une vingtaine de chroniques dont cet album est un florilège.
Et, celui qui est accessoirement directeur de la collection Pataquès qui publie cet album, s’en tire bien, dans l’ensemble. Le travail est sérieux, voire pointu, à tel point d’ailleurs qu’on se perd parfois dans le jeu complexe des raffinements infinis du langage. La recette du narrateur personnifié et d’une narration dialoguée, notamment avec des célébrités historiques comme Platon ou Richelieu, est par contre un peu poussive. Mais elle fonctionne – et pour être honnête, on voit mal comment s’y prendre autrement sans être rasoir. L’humour est aussi parfois un peu forcé, tout comme nombres de chutes, et une impression de décousu parcourt l’ensemble (pas étonnant vu la forme originelle de chronique), même s’il reste à la fois sympathique et d’intérêt.
La Sémantique, c’est élastique est un honnête ouvrage de vulgarisation, et dans le cas où il ne vous inspirerait pas une carrière tardive de linguiste, il pourra toujours vous permettre de « frimer dans les repas de famille ou autour de la machine à café », comme il est précisé sans faux-semblants sur sa quatrième de couverture.
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