Mary, une jeune veuve de 19 ans, a pris ses jambes à son cou après avoir assassiné son époux. En pleine cavale dans les Rocheuses canadiennes du début du XXe siècle, elle court frénétiquement dans une nature aussi foisonnante qu’hostile en espérant échapper aux deux beaux-frères de son défunt mari. Ce qu’elle ne sait pas encore, c’est que leur échapper ne sera pas une mince affaire !

Après avoir terminé sa série jeunesse Les Dragons de Nalsara, Glen Chapron, s’attaque à l’adaptation du roman La Veuve de Gil Adamson. Un revirement de registre étonnant qu’il ne fait pas à moitié. Changement de cible éditoriale, d’approche et de technique graphique. Dès les premières pages, le ton est donné : l’atmosphère est lourde, la tension omniprésente. L’intensité du récit ne retombe jamais, notamment grâce à l’interprétation graphique de l’auteur. Le dessin tout en noir et blanc charbonneux est d’une picturalité saisissante. Énergique, il accentue le rythme effréné et sublime les paysages sauvages traversés tout en entrant en résonance avec les tourments et la fébrilité de Mary.

Œuvre poignante et puissante, La Veuve emporte le lecteur dans une aventure aussi sauvage que l’environnement qui l’entoure, tout en lui offrant une réflexion sur la place des femmes dans un monde d’hommes. Au-delà du thriller haletant et du drame psychologique qu’est cette cavalcade riche en événements et rebondissements, La Veuve se veut aussi un récit féministe. Mary n’est pas simplement une victime fuyant un destin tragique. C’est une femme qui, au contact des éléments, des autres et d’elle-même, trouve en elle des forces insoupçonnées et fait preuve d’une force et d’une résilience impressionnante. Sa fuite se transforme peu à peu en un parcours de reconstruction personnelle et contribue au façonnage de son caractère, à son émancipation et à la reconquête de sa nature profonde.