Le Fil d’Ariane
Ariane a disparu. Peintre, très indépendante, révoltée même, elle cherche une nouvelle voie picturale pour exprimer ses angoisses et ses rêves, et se penche sur le fameux mythe de Thésée, du Minotaure, et donc de son homonyme antique, la célèbre Ariane et son fil. Et à force de se pencher, elle finit par tomber, plus ou moins métaphoriquement : elle tombe sur des snobinards, un potentiel violeur, des tortionnaires déguisés, une impasse artistique, une petite fille effrayée… Et elle disparaît : ses proches n’ont plus de nouvelles et sa soeur engage un détective privé pour retrouver sa trace…
Toujours à contre-courant de la bande dessinée traditionnelle, Nadja développe ici une double enquête entêtante, comme un rêve pénétrant et angoissant. Celle d’Ariane, d’une part, sur une piste intime, intellectuelle et artistique, autour de la trahison de Thésée abandonnant Ariane sur une île, après avoir promis de l’épouser une fois le Minotaure défait. Celle du détective, d’autre part, en apparence plus classique – voire volontairement cliché – qui cherche les traces de la peintre évaporée. Il y a du Twin Peaks dans ce dispositif, du Blutch époque Vitesse moderne aussi, par cette atmosphère sulfureuse et funeste. Mais il y a surtout du Nadja, avec un scénario complexe évoquant les violences – physiques et morales – faites aux femmes, et un graphisme unique, une BD toute en peinture, faussement naïve et vibrant d’émotion. Étrange, hypnotique et insondable, violent et magnifique, comme un mythe grec.
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