Le Fils de l’Ursari
Une famille de gitans, montreurs d’ours et petits magouilleurs de campagne, est poussée hors d’un village d’Europe de l’Est, pour divers larcins. En panne, ils sont alors récupérés par des passeurs qui leur promettent monts et merveilles, en France. Les voilà donc parqués dans un bidonville sous une bretelle d’autoroute, en banlieue parisienne. Contraints de faucher de la ferraille et de faire les poches aux passagers du métro, à l’image du petit Ciprian qui apprend les ruses de son grand frère. Mais un jour qu’il traîne du côté du jardin du Luxembourg, il observe des Parisiens jouer aux échecs. Et chaque jour, il va revenir et assimiler les ficelles du jeu de stratégie…
Adaptation d’un roman jeunesse de Xavier-Laurent Petit, Le Fils de l’Ursari est un gros volume à destination des lecteurs dès 10 ans, plein de rebondissements et d’émotions, dans un décor contemporain. Les thèmes du déracinement, de l’identité, des migrations, de la xénophobie, du travail des enfants, du mal logement, de l’illettrisme, sont abordés avec sobriété et sérieux, au fil d’une intrigue qui parvient à ne pas tomber pas dans le misérabilisme en prenant le chemin de l’espoir. Celui de l’école de la République et de la mise en relief des talents de chacun, ici les échecs (on observera l’intéressant paradoxe sémantique du mot « échec »). Cyrille Pomès (La Dame de Damas) croque à merveille son Ciprian aux allures de pantin à la tête trop grosse, grosse comme son envie de découvrir le monde. Mais aussi Paris, son luxe qui masque sa crasse, son clinquant qui fait oublier la misère à deux pas. Les couleurs d’Isabelle Merlet font beaucoup dans la réussite de ce projet, jamais belles gratuitement, toujours dans la matière, la texture, la lumière justes. La vie, en somme. Et c’est de vie que regorge ce beau et touchant livre, à mettre entre toutes les mains.
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