Le Journal du off
Pierre Bogart, journaliste pour Le Citoyen, va couvrir la campagne présidentielle de 2017. Bien informé grâce à son réseau, il recueille les brèves de comptoir de son ami Nacer, se fait pédagogue avec sa lycéenne de fille Chloé et filtre les « off » de la campagne – ces paroles déversées à micro fermé que l’on retrouve toujours, d’une manière ou d’une autre, dans un article. Entre mise en examen, jeu de cour et coups bas, le récit d’une campagne moins folle que navrante…
En préface, l’auteur Renaud Saint-Cricq explique son projet : « raconter en temps réel les coulisses de la campagne présidentielle en couvrant l’ensemble du paysage politique ». Trouver les infos relevait donc du défi. Mais voilà, l’ambition de l’album a été dépassée par un scénario inattendu et c’est bien le problème ici : les auteurs passent à côté de leur sujet. On s’explique. « L’habillage fictionnel » est plutôt bien vu. À travers les yeux d’un journaliste, on suit les tractations, les coups de gueule et les retournements de situation d’une campagne harassante. Largement centré sur la droite et ses déboires avec Fillon, l’album décrit la confusion d’un côté, de l’autre les atermoiements agaçants d’un François Hollande déboussolé. Quid de l’homme à l’ascension fulgurante que personne n’attendait à cette élection ? Rien ou presque. À croire que les auteurs, pour le coup, manquaient d’infos de ce côté. Hamon, Mélenchon, Valls, Juppé, Fillon ou Sarkozy s’agitent ainsi en vain, déjà dépassés, sans le savoir, par un homme qui a tout compris avant eux. Mais on ne lira rien sur le sujet dans la BD. Et c’est le plus regrettable ici. Car au final, l’album montre surtout des pratiques politiciennes déjà datées, des petits bruits de couloirs et des enfantillages d’hommes mus par la seule ambition individuelle.
Peu de révélations donc, quelques traits d’humour ici ou là, mais surtout un ensemble peu intéressant et bavard. Et le dessin de James, si alerte d’habitude, échoue ici à croquer de belles caricatures, tout juste des images affadies et peu reconnaissables d’une galerie politique ringardisée. Bref, si malgré tout la BD se lit, elle se révèle mal centrée, anecdotique et pénalisée par son souci de l’urgence.
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