Le Mari de mon frère #1
Mike Flanagan, Canadien aux allures de bûcheron hyper-viril, entreprend un voyage identitaire au Japon sur les traces de son défunt mari. C’est ainsi qu’il se retrouve devant la porte de Yaichi, frère jumeau de l’amour de sa vie qui élève seul sa fille, Kana, enfant espiègle, enthousiaste et dynamique. Yaichi se voit dans l’obligation d’accueillir ce beau-frère gay, vis-à-vis de qui il ne sait pas comment se comporter. Ce n’est pas la même chose pour Kana qui, avec son caractère enjoué, voit en ce tonton du Canada, une chance !
Gengoroh Tagame est un mangaka d’ouvrages érotiques homosexuels qui connaissent un réel succès depuis les années 1990. Sa notoriété tient en ces nombreux travaux publiés dans différents magazines gay japonais, tel G-men ou SM-Z. Publié et traduit dans de nombreux pays, l’auteur décide d’explorer aujourd’hui avec succès un thème plus social et sensible avec la série Le Mari de mon frère dont les trois premiers tomes sont sortis en France. La série est toujours en cours au Japon et a reçu le Prix d’excellence du 19e Japan Media Arts Festival.
Dans cette série, tout tient dans le savant équilibre créé par l’auteur. C’est avant tout une histoire de deuil (d’un mari, d’un frère). Puis une histoire de tolérance, quand Yaichi se questionne sur cet homme doublement étranger à lui, et par son origine canadienne, et par son homosexualité, mais aussi à travers les yeux de Kana et la candeur de ces interrogations qui rendent tout simple et évident. C’est enfin une histoire d’humour et d’amour entre ce trio atypique : la fraîcheur de Kana, les interrogations de Yaichi, les maladresses et la simplicité de l’ours Mike.
Parfois le didactisme appuyé – le mariage gay, le triangle rose – peut apparaître un peu poussif, mais en même temps on accepte volontiers cette approche civique qui, si elle ne semble pas nécessaire, remplit un rôle instructif louable. Plus intéressantes, les discussions de Kana avec Mike, avec Yaichi et avec ses amis de l’école, donnent des points de vue décentrés des codes moraux et sociétaux sclérosants. Le monde vu par Kana, un monde dénué de jugements !
Le dessinateur a su créer une savante symbiose entre un trait de manga familial et accessible à tous, petits et grands, et des silhouettes masculines qui rappellent que le mangaka est un fin connaisseur de l’anatomie masculine et des codes gay : Mike, archétype du bûcheron canadien de la famille des ours, peut même apparaître un brin caricatural ! Yaichi n’est pas en reste : quelques pages révèlent le profil sexy de ce beau-frère hétérosexuel qui trouble Mike par sa ressemblance avec son défunt « husband ».
Franche réussite que cette invitation à la tolérance et la lutte contre l’homophobie passive ; Gengoroh Tagame joue sur différents registres et se permet même, en fin de volume, un cliffhanger qui vous fera enchaîner directement sur le tome deux !
OTOUTO NO OTTO © Gengoroh Tagame 2014 Futabash Publishers LTD., Tokyo
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