Le Patient
Il ne reste qu’un survivant au massacre. Grand-mère, mère, père, petits frères et soeurs sont passés à la lame du couteau. Et la grande soeur, adolescente marginale et coupable désignée, s’est donné la mort. Il ne reste donc que le plus âgé des frangins, coincé dans le coma depuis six ans. Un visage d’ange, juvénile malgré ses 21 ans. Et qui se réveille enfin. Commence alors sa rééducation, et des séances poussées avec une psychologue, qui veut comprendre ce qu’il s’est réellement passé cette terrible nuit…
Après le superbe et plébiscité Ces jours qui disparaissent, Timothé Le Boucher était attendu. Il revient avec un thriller psychologique de 300 pages, tout en tension et manipulation. Là où son précédent ouvrage brillait par son idée scénaristique vertigineuse, ce Patient-là impressionne par sa maîtrise narrative et son dessin bien mieux tenu. En effet, les progrès graphiques du jeune auteur sont frappants, dans l’anatomie, les postures, la précision des décors et accessoires. Mais surtout, son découpage, ses dialogues, ses cadrages et ses gros plans installent une atmosphère étrange, d’où émane le malaise. À la limite du fantastique, parfois. Il prend son temps pour installer ses personnages, ajouter de pertinents flashbacks, offrir des digressions pour mieux perdre son lecteur… Timothé Le Boucher est extrêmement malin, car pour mieux raconter une histoire de manipulation mentale, il joue lui-même à manipuler son lecteur. Et à ce niveau-là, c’est rare. Dès lors, on pardonnera une fin un peu ambigüe et pas aussi forte qu’attendue, l’allure trop sexy de la psy, et une homosexualité latente inutile. Car entre les superbes scènes de pénombre, le jeu de séduction/répulsion entre les deux protagonistes et la montée en puissance du récit, on a affaire à un album de genre de haute volée.
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