Le Printemps des quais
Certains l’ont qualifié de chaînon manquant entre Jean Renoir et la Nouvelle Vague de François Truffaut. Pourtant, Séraphin dit « Paul » Carpita n’a pas connu la carrière flamboyante de ces grands cinéastes, car son principal long-métrage, Le Rendez-vous des quais (dit aussi Le Printemps des hommes), a été censuré en 1955. Il avait été tourné avec des bouts de ficelles et sans autorisation, avait obtenu l’appui du Parti communiste, mais surtout mettait en scène un mouvement de grève des dockers et surtout militait contre la guerre en Indochine.
Cet album est l’histoire du tournage, rocambolesque et plein d’entrain, d’un film engagé et social, par un instituteur féru de cinéma, qui apprend tout sur le tas. C’est aussi le portrait d’un jeune homme qui a rejoint la résistance et la cause communiste, et qui a vu son film caviardé par les instances rigides du PC et mis sous scellées par la censure d’État. Avant que la chape de plomb ne se lève avec l’arrivée de Mitterrand au pouvoir et qu’une bobine soit miraculeusement exhumée. Une belle histoire, en somme, documentée et sincère. Truculente et chaleureuse comme une fiction marseillaise. C’est ce qui permet de s’accrocher dans un récit parfois alourdi par de longs récitatifs et dialogues, et des scènes par trop statiques – dans le registre du dessin réaliste, Olivier Thomas (La Grande Évasion – Biribi) est parfois à la peine.
Le Printemps des quais demeure au final un album intéressant et bien fichu, mais sans grande originalité narrative ou graphique, qui s’inscrit dans une veine grand public à l’ancienne, entre pédagogie colorée et tranche de vie émouvante. Pourquoi pas.
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Dans le même registre et magnifique : « un homme est mort » de Davodeau.
Très beau, très émouvant et très juste.
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