Le Retour
En 1945, un enfant de 12 ans vit avec sa mère dans une ville anglaise largement bombardée. Les décombres deviennent un terrain de jeu, tandis que les femmes et ceux qui sont restés en retrait de la guerre attendent le retour des soldats. « Maintenant ça ira mieux », répète la mère. Mais le retour du père ne se passe pas comme prévu et les mots « syndrome post-traumatique » sont lâchés.
L’idée géniale de cet album extrêmement puissant, tant par son sujet que par son traitement, est que l’enfant dessine. Des dessins simples qui disent la vérité, et la vérité peut être une arme. La montée en puissance du récit est très bien orchestrée: d’un début réaliste, ancré dans le contexte politique de l’époque (la question de la couverture sociale en Angleterre est interrogée et comparée à celle pratiquée en Allemagne et celle qui prit place durant la guerre), on passe peu à peu au drame personnel et intime, qui va se jouer dans le cercle familial.
Le traitement graphique tout en sobriété, réalisé à la pointe du Bic ou au crayon, épouse le sujet. À la fois précis et économe, on y trouve tout ce qu’il faut d’émotions et de détails pour être plongé dans le récit. Les ruines figurent évidemment la psyché des personnages. Tels les vestiges de la ville, les hommes ne peuvent parfois pas être réparés et sont condamnés à être déblayés. Enfin, l’album doit sa réussite aux personnages secondaires : le meilleur ami, sa sœur, le petit ami de sa sœur, l’instituteur et le prêtre qui joue un rôle de confident. Tous se débattent dans une époque difficile et présentent une face complexe.
La force du dessin, tel que l’envisage Benjamin Dickson, est de montrer la vérité, pour s’en distancier et s’en souvenir. Enseignant, dessinateur et scénariste, il utilise l’art pour aider des adultes vulnérables. La force de son livre (qui lui a été inspiré par les souvenirs de son père) s’en ressent. Au-delà de la simple transmission, il insuffle ses convictions personnelles au cœur de la trame narrative, ce qui en fait une lecture simple, forte et poignante.
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