Par Chihoi, d’après une  nouvelle de Hung Hung. Atrabile, 13 €, mai 2010.

Un train qui file à toute vitesse. Bien équipées, ses voitures proposent toute sorte de loisirs et de services : cinéma, piscine, jeux en tous genres, restaurants, etc. Des dizaines de passagers s’y engouffrent aux quelques arrêts, mais peu de monde semble en descendre. Au milieu de cette foule de gens qui se sont littéralement installés dans le train, un homme cherche désespérément une femme. Et il voit défiler sa vie comme on regarde le paysage à travers la vitre du wagon.

Il est rare de lire une bande dessinée qui tient autant du poème surréaliste que de la narration graphique. C’est pourtant ce que réussit le Hongkongais Chihoi, qui adapte une nouvelle poétique et absurde du Taïwanais Hung Hung. Le train y est présenté comme une allégorie de la société moderne qui, par une débauche de divertissements et de produits de consommation, écarte les individus de leur quête personnelle et dénoue les relations entre eux. Le héros erre entre les wagons à la recherche d’un amour perdu, fait face au regard indifférent des voyageurs et rêve de sa propre fin. On est immédiatement transporté par ce voyage onirique, traité avec une grande sobriété par de larges images crayonnées. Et on se réjouit qu’Atrabile publie en fin de volume la nouvelle originale, intitulée Le Manège, un très beau texte, drôle et désespéré à la fois.

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