L’Echappée
Un homme marié, deux enfants, mène une vie très urbaine dans une ville qu’on imagine être New-York. Les jours, les semaines se répètent, entre petit-déjeuner familial, course dans la foule pour atteindre le bureau, la commande de pizzas le soir pour la progéniture, tandis que Monsieur et Madame vont au restaurant, au spectacle…
Et puis un jour, la machine se dérègle : notre héros, regard terne et cerné, fait tomber par accident son portefeuille dans une bouche d’égout. Comme piqué au vif par la mésaventure, il embarque sur le premier paquebot venu, pour une destination inconnue. Le bateau chavire, le naufragé est recueilli par des villageois chaleureux, quoique finalement plutôt inquiétants, avec leurs yeux comme des billes et leur perpétuel sourire. Fin de l’acte II, début de l’acte III : l’homme se fait la malle, atterrit dans la jungle où, après quelques déboires, il s’épanouit au côté d’une belle sauvagesse.
Drôle d’Echappée que propose ici Grégory Mardon (Le Fils de l’ogre, Sarah Cole). Muet, l’album semble uniquement constitué de chausse-trapes. Le héros fuit perpétuellement son environnement, sans laisser au lecteur une chance de le connaître vraiment. De longues digressions l’éloignent encore plus du sujet — la dénonciation d’un quotidien trop contraint ? La crise de la quarantaine ? L’envie de vivre de façon décroissante ? Malgré un trait fluide, agréable, et des ambiances colorées efficaces (une teinte par « acte »), le livre peine à dépasser l’exercice de style. Il nous laisse de côté, regrettant qu’une technique habile se mette au service d’un récit finalement creux.
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