Juillet 1959, la riposte terrienne contre l’insidieuse invasion martienne accélère enfin. Le capitaine Bob Leclerc, colosse taiseux et patriote, est sommé de rejoindre un projet canadien ultra-secret, qui enverra une fusée révolutionnaire vers la planète rouge, pour enfin détruire l’ennemi. Mais avant de décoller pour cette mission périlleuse, il faut s’entraîner, apprendre, répéter, se préparer…

La longue, angoissante, et fastidieuse préparation à un voyage spatial, qui sera peut-être sans retour, c’est ce qu’a choisi de raconter, avec moult détails, le Québécois Grégoire Bouchard, dans ce premier tome. Un parti-pris surprenant et risqué, car on n’y lit presque aucune scène d’action sur plus de 200 pages ! Récitatifs en voix off et surtout interminables monologues des scientifiques et militaires de la base terrienne alimentent un récit lent, dont le côté statique est accentué par le découpage quasi immuable des planches en quatre cases égales. Il y a par moments de quoi décrocher, d’autant que le héros ne doit lâcher que cinq ou six phrases dans tout le tome ! Mais le soin, l’obsession pourrait-on dire, de Grégoire Bouchard pour tout décrire, en mots comme en dessins, des concepts de vols spatiaux et des secrets de construction de la fusée, impressionne. Si les personnages sont comme des figurines rigides et mono-expressifs, les décors, eux, fourmillent de détails incroyables, sur lesquels l’oeil pourrait s’attarder des heures. L’ensemble forme un hommage agréable et étrange à la science-fiction – naïve et parano – des années 1950-60, au ton et au design singulier, qui demande un réel effort d’immersion. Mais gageons que le voyage, qui se prolongera dans l’espace au fil du volume suivant, récompensera le lecteur de cette aventure pour l’heure immobile.