LES + DU BLOG : « HENRI DÉSIRÉ LANDRU »
Les dames séduites par Landru commençaient par connaître la douceur d’un bon lit avec tout ce qu’il faut à bord…
POELE A GRATTER
Henri Désiré Landru fut guillotiné le 22 février 1922, après avoir été reconnu coupable des meurtres de 22 femmes. Des affaires leur appartenant (agrafes, boutons-pression, etc.) avaient été découvertes dans le poêle de la maison de campagne de ce Parisien et des débris humains exhumés de son jardin. Aucun corps identifiable n’avait été retrouvé, l’accusé n’avait jamais rien avoué. Un des arguments de l’accusation – qui fit beaucoup rire – fut que ce barbichu séducteur achetait toujours un aller-retour Gambay pour lui et un aller simple pour sa dulcinée du jour. Évidemment, si celle-ci s’en allait par la cheminée, la dépense d’un billet retour ne s’imposait pas.
Partant de ces données, Chabouté s’est mis en tête de raconter la véritable histoire de Landru. Sans évidemment toucher un seul de ces éléments historiques mais s’autorisant tous les chemins parallèles. Ses pistes étaient simples : l’arrestation de Landru se produit le 12 avril 1919, quelques mois après l’armistice qui met fin à la guerre de 14-18. On peut supposer que le gouvernement ne vit pas d’un mauvais œil une affaire criminelle jetant un tel boucher sous les feux de l’actualité. Tant que le public se passionnerait pour les crimes de Landru, sans doute penserait-il un peu moins aux responsables de l’autre boucherie, celle qui venait de coûter la vie à des millions de jeunes Français et Allemands.
… ensuite, pour les malheureuses, tout se gâtait très vite.
Mais Chabouté, contrairement à d’autres, ne se contente pas d’une idée simple qu’il exploiterait jusqu’à la corde. Au fil des pages, à peine le lecteur pense-t-il avoir compris, qu’un nouveau rebondissement l’envoie dinguer contre les limites de la logique. Le récit frôle le grand guignol avant de se terminer en boucle parfaite. L’histoire officielle peut continuer, seuls les lecteurs de Chabouté sauront qui a vraiment tué les disparues de Gambay. Et pourquoi. Jouissif.
Prince du noir et blanc, Chabouté, quand il dessine superbement la misère des poilus dans leurs tranchées inondées et puantes, fait évidemment penser à Tardi. Mais on ne peut s’empêcher de rappeler que le rêve de Tardi serait de publier ses histoires dans la presse, en feuilleton, sur du mauvais papier peut-être, mais lues par le plus grand nombre (BoDoï 95). C’est également, parfois, le rêve d’un Rosinski. Chabouté s’inscrit dans cette lignée de conteurs au trait parfaitement maîtrisé et travaillant sur des scénarios béton respectant toujours son public, qui devrait être le grand public.
Mais pour cela, peut-être faudrait-il que les 138 planches de Landru – recommandé par Historia, soutenu par le conseil national du Livre, Prix RTL septembre, c’est la classe -, édité par Vents d’Ouest, ne soit pas forcément imprimées uniquement en grand format, sur magnifique papier glacé, et vendues 18 euros. Pardon, 17,99 euros.
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