Les Enfants de l’Empire #1
En 1929, Séoul se nommait Gyeongseong et la Corée était sous domination japonaise. Outre l’aspect autoritaire et colonial du joug nippon, ce qui frappe, c’est l’opposition entre la modernité galopante introduite via le goût japonais pour les choses venues d’Occident, et une société coréenne encore très traditionnelle et conservatrice au niveau des moeurs. Cette période de l’Histoire peu connue chez nous est contée ici par Yudori (Le Ciel pour conquête) à travers deux personnages de grands adolescents : Arisa Jo, fille d’un riche homme d’affaires, avide d’émancipation et de modernité ; et Jun Seomoon, orphelin d’un notable de la campagne, sans le sou, mais bon élève et éduqué à l’ancienne.
Tout les oppose, mais forcément, dans les histoires, les contraires s’attirent. Yudori met en scène cette romance naissante dans un style mêlant sérieux et légèreté, avec quelques pointes d’humour, mais toujours pour mettre en avant sa peinture de la Corée de l’époque. Le conflit entre tradition et modernité, entre rejet et complaisance avec l’occupant japonais, entre les langues, les usages… Ce contexte est intéressant, mais l’album pêche parfois à trop vouloir en faire. S’inspirant des mangas, dans sa mise en scène, ses cadrages, ses postures et sa façon de faire évoluer la relation entre ses deux héros, l’autrice n’en maîtrise pas encore la puissance narrative. Là où la BD japonaise réussit souvent à trouver l’équilibre entre exubérance des sentiments et subtilité de leur démonstration, ce premier tome peine à se situer et à demeurer convaincant dans la longueur. La faute, peut-être, à une voix off trop didactique, et à l’envie, légitime, de compiler beaucoup d’informations en peu de pages, ce qui fait qu’on a du mal à valider le côté archétypal des jeunes héros… Mais on gardera de ce projet ambitieux l’intérêt pour le fond, une ambiance visuelle charmante malgré quelques très vilains dégradés de couleurs en arrière-plan, et une trame scénaristique légère à même de séduire le coeur d’un jeune lectorat en quête de fictions sentimentales.
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