Les Navigateurs
Après 20 ans d’absence, Neige est revenue à Paris. Elle entre en contact avec ses anciens copains du coin, Max l’écrivain, Sébastien l’éditeur et Arthur le baroudeur. Dans sa splendide demeure familiale, elle leur dévoile une fresque, qu’elle a découverte sous une tapisserie en cours d’arrachage, un paysage de style Art nouveau, assez mystérieux. Mais peu après, Neige disparaît, sans laisser de trace. Ou plutôt si : elle semble avoir été happée par la peinture murale, qui représente, maintenant totalement découverte, une araignée géante emportant une jeune femme qui lui ressemble étrangement.
Sous une couverture classieuse aux dorures intrigantes et un joli dos toilé, le nouveau projet du duo Lehman-Caneva (Metropolis) démarre comme un récit fantastique vaguement lovecraftien, dans un décorum littéraire et pictural. Puis, c’est un polar qui se construit, une enquête sur les traces de la disparue qui met au jour un bien plus vaste mystère, et le récit se fait alors magique et horrifique à la fois. À cela s’ajoutent un drame intime et surtout une vision fantasmée d’un Paris d’un lointain passé, noyé des flots obscurs à la navigation périlleuse. N’en disons pas plus pour ne pas déflorer les secrets bien gardés d’un scénario vertigineux, comme on en lit trop rarement en bande dessinée, et dont Serge Lehman s’est fait le spécialiste (La Brigade chimérique, L’Homme gribouillé). Notons juste, petite déception, que les fêlures du passé de Max et Neige sonnent un peu trop mélodramatiques pour être bien en accord avec le reste, faisant redescendre d’un cran la tension mystique de l’intrigue pour la faire presque basculer vers le sirupeux. Mais on le pardonnera, tant l’idée générale est ambitieuse et la mise en image convaincante, dans un noir et blanc réaliste qui glisse sans prévenir vers l’organique ou la gravure. Prenez place aux côtés de ces Navigateurs, vous vous souviendrez longtemps du voyage.
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