Dans un petit village croate, deux adolescents entament leur dernier été d’insouciance, et rêvent de quitter leur campagne pour rejoindre Berlin. Mais le discret David et le facétieux Vanjac sont un peu trop proches selon la famille du premier, qui décide de prendre leur avenir en main. Sous le regard naïf du petit frère de David, des nuages sombres viennent bientôt ternir le ciel des deux jeunes hommes.

En adaptant librement Pederi, nouvelle de l’autrice croate Olja Savicevic, Danijel Zezelj et Jelena Paljan livrent un album au ton oppressant, dans lequel l’intolérance des adultes est palpable, et contraste avec l’innocence touchante du jeune frère. Le récit est lourd de non-dits, autant sur la relation des deux jeunes que sur le contexte de l’histoire. Aucune date n’est donnée, mais l’ombre de la guerre est omniprésente, dans le paysage comme dans les esprits. Quelques dialogues manquent toutefois un peu de clarté, ce qui est dommage vu le peu d’éléments dont on dispose pour comprendre l’action.

Sous la plume de Zezelj (Babylone, Starve), la verdoyante campagne croate se transforme en prison de lignes éclatées et tranchantes, dans un noir et blanc tout en contraste et jeux d’ombres. Ses compositions frappantes, peuplées de figures monstrueuses sorties de l’imagination du petit, relèguent presque le récit au second plan.

Le final, pessimiste et amer, réussit à conclure de manière percutante cet album court, dont l’on retiendra avant tout son impact graphique et son aperçu sans fard d’un monde à la mentalité étriqué.