Les hommes et la plupart des mammifères ont disparu de la surface de la Terre depuis une cinquantaine d’années. Ou presque : il reste quelques poches de survivants sous terre, et des bestioles nocturnes. Car c’est le soleil qui est le responsable de la maladie qui a dépeuplé la planète. Mais la biologiste Flora a trouvé un remède, concocté à partir d’écailles des papillons Monarques, qui migrent du Sud au Nor des États-Unis. Tout en les suivant par la route et en travaillant à un vaccin, elle s’occupe de la petite Elvie, boule d’énergie de 10 ans, qui rêve de revoir un jour ses parents…

Au rayon de la SF post-apocalyptique, les BD se bousculent. Mais celle-ci fera date, par l’originalité de son postulat, son rythme très romanesque et ses belles trouvailles narratives. Ainsi, les deux héroïnes frondeuses et solides traversent un pays vide, abandonné, et craignent de croiser d’autres humains, probablement dangereux et devenus fous à force de vivre dans des sous-terrains. Jonathan Case (Le Tueur de la Green River) fait ainsi monter le suspense pas à pas, en prenant son temps au fil d’un roman graphique qui n’a pas usurpé son nom, tant le dispositif immersif – accentué par les pages du journal intime d’Elvie – fonctionne parfaitement. On arpente les chemins accidentés avec Flora et Elvie, on est pértrifié de les imaginer périr lors d’un tremblement de terre, on hésite avec elles quant aux risques à prendre pour tenter de sauver des vies. Et on se prend à retrouver un vrai plaisir à lire un road-trip post-apo, genre pourtant éreinté a priori. Mais son angle positif, son ton plein d’émotion et son graphisme lumineux – entre Matt Kindt et Molly Knox Ostertag – offrent à ces Petit Monarques une énergie rare et enthousiasmante. Une des très belles surprises de l’année.