L’Histoire du cinéma a retenu quelques noms fameux, tels les frères Lumière, Edison, ou le magicien Georges Méliès. Mais quid de Charles Pathé, Léon Gaumont, Alice Guy ? Ces pionniers du cinématographe ont pourtant joué un rôle majeur, tant dans la création des films eux-mêmes que dans la recherche de système de captation et de diffusion, et dans la commercialisation. Entre art et industrie, le cinéma est né de tâtonnements, d’intuitions, d’investissements bien sentis, mais aussi de crises et de jalousies. C’est ce que retrace cette saga documentée et palpitante.

Si la pionnière longtemps oubliée du cinéma français Alice Guy a fait l’objet d’une bio par Catel et Bocquet, cette fresque se veut plus large en suivant le parcours de plusieurs entrepreneurs et créatifs plus ou moins inspirés, tels Gaumont et Pathé. Et ce, afin de montrer que l’amélioration par les frères Lumière du système de diffusion d’images mouvantes initié par Thomas Edison, n’aurait peut-être aboutie à rien sans le flair et l’enthousiasme de quelques investisseurs et industriels. Fort de la documentation réunie par Damien Maric et de sa ligne directrice, Guillaume Dorison construit ainsi une belle saga humaine, très fluide malgré la richesse des informations historiques et la multiplicité de ses protagonistes, avec des temps forts d’une grande puissance, tels l’incendie du Bazar de la Charité suite à l’embrasement d’un appareil de projection, ou le tournage en décor naturel – colossal pour l’époque – d’une Passion du Christ par Alice Guy. Le trait de Jean-Baptiste Hostache, réaliste mais pas guindé, voire assez légèrement esquissé par moments (sur les visages notamment), donne du souffle à cette aventure industrielle et artistique passionnante. Un modèle du genre.