Les Terres creusées ****
Par Nicolas Roudier. Actes Sud BD, 15€, le 16 février 2011.
Ils creusent la terre, inlassablement, en respectant « les angles », ne s’arrêtant qu’à neuf heures pour ne pas perturber le sommeil des « gens » – car « la nuit c’est leur intimité, si on la viole ça les rend méchants. »
Ils sont trois: le Général, qui guide les opérations de son fauteuil et regagne son lit chaque nuit, Lecreux, affublé d’un casque et d’une lampe frontale, et Mademoiselle, un géant quasi muet, totalement soumis au chef de bande. Continuellement, le groupe de spéléologues creuse et emplit des seaux qui seront vidés. « Un trou, ce n’est pas juste un chemin, un passage, assure Lecreux. Ce n’est pas qu’un tunnel, c’est déjà de l’architecture. »
On pourrait dire la même chose de ces Terres creusées vertigineuses, façonnées brillamment par un architecte de la page. Nicolas Roudier suit du crayon la progression de ses héros sous terre, en décomposant leurs mouvements. Chacun habite l’espace, l’explore, tente de le fuir ou de l’envahir. Citant à propos Voyage au centre de la terre de Jules Verne et Vendredi ou Les Limbres du Pacifique de Michel Tournier, l’album s’engouffre dans l’absurdité, étoffée à la fois d’une pointe de malice et d’un brin de désespoir.
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