L’Esprit rouge
Février 1936, Antonin Artaud débarque à Veracruz et se dirige vers Mexico. Il séjourne dans la capitale mexicaine, alors que le pays est en ébullition et connaît des moments chaotiques post-révolutionnaires. Entre mal-être et crises de manque dues à son accoutumance à la drogue, Antonin Artaud y écrit, y donne des conférences. Il rencontre aussi le peintre Diego Rivera à qui il confie que, selon lui, la révolution mexicaine doit se plonger dans les racines ancestrales du pays pour bâtir l’avenir, plutôt que de s’inspirer du socialisme scientifique européen. En septembre 1936, il décide de partir dans les terres, à la source de la civilisation indienne, à la rencontre des Tarahumaras.
Il se dégage une atmosphère onirique de cette bande dessinée. Le texte épuré et le dessin envoûtant nous font partager la quête sensorielle et la douleur psychique d’Antonin Artaud, être à vif. Le rouge de la terre mexicaine mais aussi celui du sang d’Artaud, en souffrance après chaque séance d’électrochocs, y est très présent. En effet, l’ouvrage retrace aussi l’internement douloureux de l’artiste à Rodez après son séjour au Mexique. Tandis que le dessin de Zéphir (Le Grand combat) alterne entre traits au crayon et pleines pages évoquant des tableaux expressionnistes, le scénario de Maximilien Le Roy (Thoreau, la vie sublime, Nietzsche, Gauguin, loin de la route…) est sobre et tout en retenue. Un ouvrage qui rend un bel hommage à un talent majeur de la littérature du XXe siècle, doué, tourmenté, en quête d’un apaisement qu’il trouva pendant cette expérience mystique auprès des Indiens.
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