L’Oeil de la nuit #1
Serge Lehman n’en a pas fini avec son univers initié avec La Brigade chimérique, et développé à travers Masqué et Metropolis. Il faut dire que son monde peuplé de super-héros piochés dans la littérature feuilletonesque française et européenne est foisonnant, sans être un simple carnaval de justiciers vaguement costumés. Chez Lehman, tout fait sens, même ce qui est caché.
Il s’agit ici d’un prequel à la Brigade, mais qu’on peut lire indépendamment : une série consacrée à Théo Sinclair, aristocrate souffreteux amateur de sciences et avide de sensations fortes, qui deviendra le Nyctalope. En cette année 1911, on est plongé parmi la bonne société parisienne, aveuglée par les progrès techniques et les promesses romanesques de vie extraterrestre. On y croise Gaston Leroux, Georges Clemenceau, Camille Flammarion, et même Arsène Lupin et une sorte de créature de Frankenstein. Car ici, la fiction irrigue la réalité autant que l’inverse. Très à l’aise dans un monde qu’il n’a plus besoin de justifier, Serge Lehman propose un feuilleton érudit et palpitant, un récit d’aventures haletant et plein de rebondissements. Au dessin, on retrouve un Gess en grande forme (Carmen McCallum, La Brigade Chimérique), dont l’usage des noirs épais et d’un trait faussement tremblant permet de bâtir une esthétique propre et séduisante pour cet univers singulier. L’Oeil de la nuit est donc un régal, dont la suite arrive très vite, dès le moi de mai. Excellente nouvelle.
Publiez un commentaire