Louisiana #1
1961. Dans le manoir cossu d’une famille blanche de la Nouvelle-Orléans, trois petites filles sont captivées par Autant en emporte le vent. Malgré leur insistance, leur grand-mère refuse de leur raconter l’histoire de sa propre enfance dans la plantation familiale, qu’elle juge trop dure pour leurs jeunes oreilles. Remuée par les souvenirs qui remontent, la vieille dame décide de confier à sa bonne le passé de sa famille, un passé douloureux marqué par le sang et la souffrance des esclaves et de ses propres aïeules.
Ce premier tome se centre sur le personnage de Joséphine, fille du premier propriétaire de la plantation, qui défend des idéaux de tolérance et d’émancipation en avance sur son temps. Pour sa première bande dessinée en tant que scénariste, Léa Chrétien pose un récit ambitieux mêlant faits historiques et drame familial. On est pourtant rapidement déçu par la tournure très classique que prennent les événements.
En effet, plutôt que de centrer la narration sur des héroïnes blanches, on aurait préféré que le point de vue se place du côté des esclaves, qui ne dépassent ici jamais le statut de marionnettes à l’existence misérable et sans aucune volonté propre. Il aurait également été plus intéressant que l’on nous raconte comment, dans l’Amérique profondément raciste du XIXe siècle, une jeune fille blanche de bonne famille peut en venir à dépasser ses préjugés et à se mettre elle-même en danger pour défendre la cause des noirs. Mais rien de tout cela ne nous est expliqué, ce qui perturbe la crédibilité tant du scénario que des personnages, qui peinent à dépasser le stade d’archétypes.
Dans un style réaliste maîtrisé, Gontran Toussaint réussit à retranscrire tant l’atmosphère moite d’une Louisiane dans ses heures les plus sombres que celle, vintage et colorée, des années 60. Difficile cependant de ne pas se sentir mal à l’aise devant les quelques scènes de viols présentées de manière quasi érotique…
Louisiana donne finalement l’impression d’un album trop convenu et dont le sujet n’a pas été pris par le bon bout. Les dernières cases peuvent cependant laisser penser que la deuxième partie de ce triptyque aura matière à surprendre… et ne serait-ce que pour sa thématique, on veut bien accorder à cette nouvelle série le bénéfice du doute.
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