Mad Dog
Un garçon d’une dizaine d’années est ballotté entre ses parents séparés : sa mère enchaîne les mecs depuis qu’elle a quitté son père, et ce dernier rumine sa haine seul avec sa bouteille. Délaissé, instrumentalisé, impossible pour le gamin de trouver sa place et de déceler le peu d’amour qui reste chez ses épaves de géniteurs. Heureusement, on lui offre un chien, qui devient son confident, son ami, son frère… Et le réceptacle de sa colère.
Fable sur la réaction d’un enfant au divorce dur de ses parents, Mad Dog aligne d’abord les clichés dans une enfilade de scènes caricaturales, aux dialogues pauvres et vulgaires. Puis vient un vrai moment de grâce : une longue séquence onirique, muette, dans laquelle le héros prend la mer, part à l’aventure et trouve sa place dans le monde. Un chapitre aérien, surprenant, plein d’émotions. Mais il ne dure pas et la dernière partie replonge dans le sordide, à travers une mise en scène toute aussi lourde que dans les pages d’ouverture. Pour un final mi-touchant mi-niais. Bref, le scénario est bancal, alternant le prometteur et le poussif.
Mais le plus perturbant ici, dans le mauvais sens du terme, est l’usage de la couleur. On peut même dire que c’est un rare exemple où la mise en couleurs gâche totalement le dessin : clairement inspiré par Moebius, Victor Meijer s’appuie sur une ligne fine et expressive, un trait de plume élégant et vintage, qu’on peut apprécier d’ailleurs dans les suppléments de recherche graphique, en fin d’album. Hélas, le dessin est noyé, étouffé sous un torrent de bleu, de rose et de violet, en aplats bouchés, en dégradés baveux, en effets de lumière peu inspirés. Rien ne respire, rien n’est mis en valeur par les teintes, ni les ambiances, ni les visages, ni les mots. Et ce choix donne à l’ensemble une apparence amateure ou dépassée, alors que l’auteur a vrai coup de crayon. Même si elle n’aurait rien changé à un scénario mal conçu, une version noir et blanc, avec des ombres ou des trames, aurait permis de donner quelque chose de plus aérien au projet. Tant pis.
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