Par Pierre Wazem. Futuropolis, 20€, le 22 août 2012.

Il collectionne « les histoires impossibles à raconter », et vit d’affabulations. Le narrateur de cette bande dessinée est… un auteur de BD, en pleine crise existentielle. Les commandes ne se bousculent pas, son prochain livre n’est pas encore en gestation. Et, déjà, les impayés s’accumulent et l’expulsion menace.

Devenu « jouisseur et flemmard », l’artiste se sent aussi un imposteur. Il aime sa femme et leurs petites filles, pratique l’amour libre — en cachant l’existence de ses maîtresses à sa légitime, pourtant tout à fait au courant de ses manoeuvres —, se fait remonter les bretelles par une mère bigote, qui le verrait mieux chauffeur de taxi. Tout semble changer à la faveur d’un accident (un hérisson accidenté, portant un dossard !) : l’auteur en peine déniche une maison délabrée perdue dans la forêt, par laquelle il peut accéder à la planète Mars. Sur l’astre rouge, il va réactiver son inspiration défaillante, se confronter à ses proches, et enfin remettre sa vie sur des rails…

Avec un humour nappé d’un zeste de désespoir, le Suisse Pierre Wazem (Koma avec Frederik Peeters ou La Fin du monde et Sous-sols, avec Tom Tirabosco) met en scène son alter ego. Il ose détailler prosaïquement les errances d’un artiste sans le sou, qui fut à la mode mais ne parvient plus à séduire par son dessin — un personnage « faussement humaniste et vraiment misanthrope », auquel il ne fait pas de cadeaux. Cette mise en abîme à la fois amusante et troublante (on voit le héros préparer un album, Mars aller-retour) bénéficie d’un trait rond et coloré et de superbes ambiances martiennes. Un livre que son auteur définit crânement comme « une sorte d’autobiographie mélancolique autocritique, auto-apitoyée, auto-flagellante, une genre de salon de l’auto ».

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