Minuit passé
Guerlain pousse la porte du manoir familial, inoccupé depuis si longtemps. Il l’a quitté avec ses soeurs alors qu’il n’avait que 7 ans, et a complètement occulté la mémoire de ces semaines passées entre ces murs étranges. Il est aujourd’hui adulte, restaurateur d’oeuvres d’art et père d’un petit Nisse, enfant lumineux et empathique. Une fois installés dans la bâtisse, une atmosphère étrange pèse sur Guerlain et son fils. Bruits bizarres la nuit, irruption de trois corneilles qui ne veulent pas sortir, insomnies récurrentes, le séjour prend un drôle de tour. Alors que Nisse semble dialoguer avec un ami invisible, ce sont les souvenirs qui reviennent hanter son père. Seulement les souvenirs ?
Après le prometteur Les Fleurs de grand frère et le réussi Le Jardin, Paris, Gaëlle Geniller confirme tout son talent de narratrice en images. Elle compose ici un conte fantastique au somptueux décor d’inspiration Art nouveau, à la fois envoûtant et effrayant, dont la trame interroge finement le quête d’identité des enfants et ados. Au fil de ses nuits sans dormir, Guerlain va finir par comprendre ce que veut lui dire le manoir, et c’est aussi en observant son rejeton que les souvenirs vont enfin lui revenir. Au sein de belles compositions au découpage limpide, au trait précis et aux ambiances lumineuses léchées, l’autrice tient son histoire sur un fil, sans céder au spectaculaire ni au larmoyant, et offre une fin légèrement indécise qui permet de laisser le temps de la lecture suspendu… Un joli exercice de style, niché dans un volume très élégant.
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