Gabriel fait du skate, est toujours ravi de voir ses potes, n’hésite pas à s’engager dans des combats écologiques et vivote dans son appartement parisien… C’est en quelque sorte un vingtenaire comme il y en existe plein. Enfin, presque, parce que lui, il est repéré par une agence de mannequins. Timide ne faisant ni partie du sérail, ni étant particulièrement attiré par ce métier, il se lancera tout de même dans le milieu, se disant que ce pourrait être un moyen de vivre décemment… d’avoir de quoi s’installer et commencer une vie d’adulte responsable. Seulement, ce qui n’était au départ qu’un prétexte à faire rentrer l’argent prendra de plus en plus de place, l’empêchant d’être à l’écoute de ses proches et de vivre en accord avec les valeurs qui sont les siennes.

Dans ce one-shot tournant autour de l’obsession moderne pour l’image de soi et de celle que l’on renvoie, les sujets et critiques abondent. Société ultracapitaliste, luxe, surconsommation, formatage de la beauté, suivisme… Simon Roure soulève de nombreuses problématiques sociétales et contemporaines liés à nos modes de vie. Il en dit beaucoup en en faisant finalement assez peu. Son autofiction lie l’être, le paraître et le mal-être en nous mettant face à nos contradictions schizophréniques.

Deuxième bande dessinée et premier récit long de son auteur, Monstera fait preuve de justesse, de pudeur et de sensibilité. Avec un dessin brut et crayonné épuré et loin des canons du genre, il travaille ses planches en bichromie pour jouer avec la lumière et la dynamique de ses planches. Sans se vouloir moralisateur, il pointe du doigt chacun dans sa propre responsabilité, mais aussi un monde écrasé par les publicités et les réseaux sociaux mettant plus que jamais l’être humain face à sa facticité et manipulabilité.