Mourir pour la cause
Dans les années 1960, une poignée de militants socialistes québecois, révoltés par le mépris dont la classe dirigeante anglophone fait preuve face aux francophones, décide de passer à l’action. Inspirés par les révolutions d’Amérique latine, ils fondent le Front de libération du Québec, dit FLQ. Chris Oliveros – fondateur et ancien directeur de la maison d’édition Drawn & Quaterly – raconte les coups d’éclat manqués de ces apprentis révolutionnaires sous la forme d’un reportage fictif pour la CBC, qui aurait été tourné en 1975. Soit cinq ans après une crise majeure en octobre 1970, qu’il retracera dans un deuxième tome et à laquelle ont mené les évènements des années 1960.
Le récit est découpé en trois parties, articulées autour de trois hommes, trois wannabe leaders qui auront vainement tenté de donner forme à cette lutte : Georges Schoeters, François Schirm et Pierre Vallières. Mais le manque de moyen et de formation, leur faible capacité d’action et de rassemblement, et une absence de soutien populaire vouent leurs entreprises respectives à l’échec. Les « felquistes », maladroits et naïfs, ne parviennent qu’à réaliser des actions mineures… Ce qui n’empêche pas leurs bombes de faire des victimes, à qui cette BD donne aussi une place.
Témoins, proches de victimes, ouvriers, patrons, francophones ou anglophones : le faux documentaire permet à Chris Oliveros de donner corps à tous ces points de vue, dans un numéro d’équilibriste réussi entre la proximité avec les victimes et celle avec les révoltés. Un certain humour transparaît toutefois, et amène le récit du côté de la satire, notamment quand s’exprime l’incompétence des felquistes. L’effet est renforcé par un dessin cartoon et minimaliste, qui évite le réalisme académique.
On connaît mal, en France, le contexte socio-politique ayant mené à ces tentatives révolutionnaires. C’est peut-être le principal défaut de cet ouvrage, qu’il serait difficile de comprendre sans l’annexe, très fournie. Cela n’empêche pas d’être porté par cette lecture, qui donne surtout envie d’en savoir plus sur la crise de 1970.
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