Né en Iran
Pour vivre librement en tant qu’artiste, Majid Bita a dû quitter son Iran natal, pour étudier en Italie, où il s’est installé depuis. Dans ce gros volume autobiographique, il livre comme par flashes ses souvenirs d’enfance et de jeunesse, les événements et images qui ont constitué son être et son identité, et qui font qu’aujourd’hui il se considère comme « exilé à moitié » : son coeur et sa mémoire sont rattachés à l’Iran, irrémédiablement. Et ce lien est autant une richesse qu’une souffrance.
Discussions politiques, tremblement de terre, parfums et bruits de la maisonnée, vol de confiseries ou poids de la traditionnelle couverture familiale, mais aussi images fantasmagoriques et digressions oniriques se mêlent dans des pages au noir et blanc griffé. Comme des cases abîmées par le temps qui a passé, mais aussi par l’oppression d’un régime qui n’a cessé de se durcir au fil des dictatures et des espoirs démocratiques déçus. La grande force de Né en Iran est là : ne pas raconter l’Histoire d’un pays par le menu, ni même dérouler les anecdotes chronologiques d’une enfance comme Marjane Satrapi dans Persepolis, mais proposer une vision artistique puissante et désarçonnante d’une jeunesse perturbée et d’une terre désormais trop lointaine. Le résultat est tour à tour hypnotique, troublant, violent, attachant : Majid Bita ne livre pas énième témoignage plat d’un exil brutal, il porte son regard et sa plume à des hauteurs intimes et narratives rares, pour un ouvrage viscéral et bouleversant.
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