Nerval l’inconsolé
Il a connu une première gloire littéraire à 19 ans, avec sa traduction de Faust de Goethe, mais il n’a publié son premier livre qu’46 ans, quelques mois avant sa mort. Ami d’Alexandre Dumas et Théophile Gautier, soutient fervent de Victor Hugo, Gérard de Nerval, né Labrunie, fut un des grands poètes de son temps. Mais une dépression chronique et un alcoolisme soutenu le rongeaient de l’intérieur, et ont fait de ce fils de médecin un quasi clochard, interné à plusieurs reprises. Une grande figure romantique, un poète quelque peu maudit, dont on sait finalement peu de choses.
Entre ses textes, sa correspondance, les mots de ses proches, se dessine un parcours parfois obscur, parfois mensonger, souvent approximatif, d’un homme qui a voyagé jusqu’en Égypte et en Turquie, à la recherche d’un idéal forcément inatteignable. Après Shelley et Chamisso, David Vandermeulen et Daniel Casanave poursuivent leur exploration de l’âge romantique, cette fois chez Casterman et en grand format. On y trouve toujours le même parfait équilibre entre approche documentaire et souffle narratif, dans un récit touffu mais toujours prompt à la divagation et à l’humour, cherchant en permanence l’homme derrière l’oeuvre. Vandermeulen brosse ici un portrait poignant de Nerval, le petit personnage étant tour à tour horripilant, touchant, brillant, pathétique. Forcément fascinant. Au dessin, Daniel Casanave déploie avec son aisance habituelle un graphisme à l’énergie rare, tout en petits traits saillants et expressifs, proche, dans l’esprit, de certains comic strips. L’ensemble forme une biographie dense mais inspirée, dotée d’un point de vue et d’un parti paris visuel intelligents. Rare et nécessaire, donc.
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