No Guns Life #1-5
À la recherche du cyberpunk perdu. Dans l’épisode précédent, l’auteur de ces lignes manifestait sa déception face à Cavale vers les étoiles, globalement inoffensif et abymé dans un coin disgracieux dont peu se souviendront. Après tout, ce futurisme aux câbles poisseux, rejeton désabusé des fantasmes et angoisses des années 1980, appartient peut-être désormais au passé. Condamné à subsister dans la répétition fatiguée et le clin d’oeil maniéré. Si No Guns Life n’échappe pas à cette condition d’œuvre-musée – elle remâche GUNNM, notamment, avec ses techniques martiales en allemand ou ses colosses de fer au visage démoniaco-flamboyant, façon masque de nô –, Karasuma se distingue en connectant pertinemment son titre à une problématique bouillante : le transhumanisme.
Il n’a pas qu’une balle dans la tête. Lui, c’est Jûzô Inui. Un « extend » – être humain amélioré par la technologie – dont le visage a été remplacé par un flingue, vétéran de guerre reconverti en détective pour affaires musclées. Comme un lointain cousin du Marv de Sin City, option ferraille, avec en bonus la mâchoire de l’EVA-01 (le principal géant d’Evangelion). Une clope dans ladite mâchoire, Inui traine son imper usé dans une cité tech-noire dominée par Berühren, la méga-corporation locale. Qui n’est pas sympa, mais alors pas sympa du tout – tiens, revoilà le cyberpunk ! Au fil des missions, alors que se dessinent des intrigues complotistes, l’homme se frotte aux clans qui s’empoignent à propos des êtres augmentés : ceux qui détestent, ceux qui tempèrent, ceux qui fournissent. Sans crier au génie, saluons le fait que l’auteur place vraiment ce questionnement au coeur de son oeuvre. Une connexion au réel plutôt rare dans le divertissement d’action, et tout à fait utile à l’heure où existent déjà, par exemple, les JO de l’homme augmenté – le Cybathlon, inauguré en 2016.
Sans rien inventer, No Guns Life, porté par un trait nerveux (un peu fouillis, aussi, durant les séquences mouvementées), offre suspense, grand spectacle et réflexion sous-jacente en bonnes proportions. Et un héros au vrai charisme, déjà iconique. Ça ne court pas les rues.
© 2014 TASUKU KARASUMA / Shueisha Inc.
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