Oblivion Song #1
Propulsé poids lourd de l’industrie des comics par The Walking Dead, Robert Kirkman aurait pu se contenter de gérer en rentier sa fructueuse franchise de zombies. Le scénariste s’est au contraire largement investi éditorialement chez Image, où il campe au sommet du conseil d’administration pour pousser le travail d’autres auteurs de séries. Et au sein de son propre label, Skybound, il a montré lui-même l’exemple en signant tout un tas de titres, avec du bon (Invincible, Outcast) et du moins bon (Haunt). Sa dernière née, Oblivion Song, se situe plutôt du côté des réussites. Le premier recueil qui sort, une fois n’est pas coutume, en avant-première dans plusieurs pays européens, dont la France via Delcourt, marque la tentative de Kirkman de se frotter au genre qui cartonne chez Image, la saga familiale SF. On sent que le patron a voulu tenter de se mesurer aux Saga, Black Science et autres Descender qui aspirent compliments et récompenses au sein de sa propre boîte. Et il le fait plutôt bien, avec ses armes.
Le pitch est efficace : il y a dix ans, un portail s’est brièvement ouvert entre notre monde et un univers parallèle à la faune et à la flore cauchemardesques, lequel a aspiré au passage 300 000 personnes. Un scientifique, Nathan Cole, a trouvé le moyen de se déplacer dans ce territoire hostile et mène des missions de sauvetage musclées pour tenter de ramener les survivants traumatisés. Le gouvernement montre des signes qu’il souhaite suspendre de programme. Mais Nathan refuse de baisser les bras : son frère est toujours porté disparu…
Personnages bien campés, scénario solide et bestiaire séduisant, tout en crocs et en tentacules imaginé par le dessinateur italien Lorenzo De Felici, font de ce premier tome d’Oblivion Song une entrée en matière convaincante. Kirkman ne joue clairement pas dans la même cour niveau puissance mélodramatique que les Brian K. Vaughan, Rick Remender ou Jeff Lemire. Et l’originalité n’est clairement pas le maître-mot du projet. Mais le scénariste, ce n’est pas une surprise, sait conduire un récit d’aventures, ménager des séquences d’action enlevées et alterner quand il le faut avec des temps plus calmes. Surtout, fort de son expérience à la télé, l’homme soigne ses twists et cliffhangers comme personne. À chaque fin d’épisode (les 6 premiers sont rassemblés ici), paf, il vous coupe les pattes avec le coup de théâtre qui va bien. Autant dire que comme pour la plupart de ses œuvres précédentes, on ne voit pas les pages filer.
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