Orientalisme
Des touristes en demande d’exotisme, un vieil homme au crépuscule de la vie, des jeunes agriculteurs turcs en quête d’un job, des femmes aspirées par la modernité, à l’affût de l’amour ou d’un peu de liberté…Voici les destins croisés de gens ordinaires quelque part entre l’Orient et l’Occident, le Nord et le Sud, là où l’espoir d’une vie meilleure voudrait encore avoir un sens…
Nicolas Presl (Heureux qui comme, L’Hydrie, Le Fils de l’ours père) déploie, sur une narration totalement muette et maîtrisée, un kaléidoscope de lieux, de gens, de situations, traversé par des aspirations contradictoires : rêves de carte postale et désirs d’ascension sociale, virages modernistes et ancrages traditionnels, politique et religion, urbanité et ruralité… L’auteur interroge la diversité du monde, ses clichés, ses géographies, ses sociétés, puis télescope les points de vue dans le fait incongru, tragique ou tendre, pour mieux bâtir des ponts entre les générations et les sexes.
Par l’expressivité des visages, l’audace des angles et une belle science du cadrage, l’auteur contourne l’absence de phylactères sans négliger le propos. L’alchimie des contraires, bien qu’un peu binaire parfois, fonctionne alors sans accroche. Là où les touches de rouge cristallisent un changement – le sang, la maladie, la révolution… -, les corps et les visages, angulaires et déformés à l’excès, miment, eux, une réalité « monstrueuse » tendue vers son devenir… A l’image d’Heureux qui comme, encore un travail osé et soigné de Nicolas Presl, original et lisible. Qui s’affirme comme un conte social sensible, transcendé par le pouvoir d’évocation des planches, aussi sobres que puissantes.
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