Où en est la BD numérique ? Zoom sur Mauvais Esprit
Les projets de bande dessinée numérique seront à l’honneur au prochain Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, à travers plusieurs rencontres et conférences. Et 2013 sera l’année de toutes les expériences et initiatives d’auteurs. Pour bien mesurer ce qui nous attend, BoDoï propose un petit tour d’horizon des projets existants ou en développement. Deuxième étape : Mauvais Esprit.
Au départ, il y a le blog Ottoprod, dans lequel James et Boris Mirroir (alias La Tête X) se défoulaient de leurs frustrations d’auteurs qui n’arrivaient pas signer chez des éditeurs. Et puis, devant le succès du blog, les dits-éditeurs ont pointé le bout de leur nez et les auteurs ont commencé à publier (Dans mon open space, de James, chez Dargaud, par exemple). Mais l’envie de nouveauté et de liberté ne s’est pas éteinte, et s’est confrontée à l’absence de vrai projet de BD numérique. « Nous avons constaté que le livre BD numérique ne fonctionnait pas, que le marché des albums papiers numérisés ne décollait pas non plus, se souvient James. De plus, nous étions persuadés que si les initiatives individuelles pouvaient rencontrer le succès, pour un Boulet, 10000 autres blogs demeuraient dans l’anonymat. L’idée d’un magazine collectif avec un rendez-vous régulier a vu le jour. »
James et Boris Mirroir convient alors des auteurs qu’ils apprécient (Terreur Graphique, Florence Dupré La Tour, Nicolas Poupon…) et qui se laissent séduire par le projet. Ils créent une société, avec le soutien de la librairie Comic strip café d’Antibes (où habite James). Et lancent en octobre 2012 Mauvais Esprit, un hebdomadaire numérique d’humour uniquement composé de BD courtes, à destination d’un public ado-adulte. « On creuse le sillon du strip à l’américaine, qui n’a jamais vraiment trouvé sa place dans la presse en France, poursuit James. Et selon moi, le format court est parfaitement adapté à la lecture sur écran. »
On retrouve ainsi l’esprit du blog, avec un système de lecture très simple, dans la verticalité, prévu pour l’écran d’ordinateur ou la tablette. Pas d’application, d’animation, de page virtuelle à tourner : on clique, on lit, on rit.
Les trois premiers numéros sont gratuits, puis les parutions deviennent payantes : 1,50 € le numéro, et des abonnements 4 et 12 semaines à 4 et 9 €. Une somme modique compte tenu de la quantité et surtout de la qualité de ce qui est proposé. « C’est encore timide côté abonnements, on est loin de pouvoir se rémunérer correctement. Mais tous les auteurs participant ont cette culture du risque. C’est un travail d’endurance. » Le modèle de Mauvais Esprit trouvera peut-être son équilibre dans un élargissement de la proposition éditoriale, avec, pourquoi pas, « un recueil des strips publiés ». Ou de la prépublication, comme Charles, Charles, profession président, série de Marc Dubuisson et James diffusée sur le site et qui sera publiée en papier chez Delcourt.
Dans le sillage des Autres Gens, « qui nous a ouvert les yeux, en prouvant que des initiatives professionnelles d’auteurs pouvaient fonctionner », salue James, Mauvais Esprit défriche un territoire prometteur et excitant, où écran et papier trouvent chacun leur voie de développement, en interdépendance et non en opposition.
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