Paci #1
Paci, c’est Pacifique. Un grand black en liberté conditionnelle, après avoir plongé pour des histoires de drogue. Amoureux des bagnoles et de la conduite sans limite, les go-fast, c’était pour lui. Mais il est rangé, maintenant, et ne veut plus rien à voir à faire avec les truands qui l’employaient. Plus facile à dire qu’à faire…
Si Jacques Audiard a redonné sa crédibilité au polar français au cinéma, en y distillant un réalisme puissant, un vrai point de vue et un sens de la dramaturgie, Vincent Perriot est en train de faire de même en bande dessinée. Après le convaincant diptyque Belleville Story, le jeune dessinateur d’à peine 30 ans passe la vitesse supérieure avec cette nouvelle trilogie. Paci emprunte pourtant une trame ultra-classique en suivant l’itinéraire d’un gangster repenti, sur qui le sort et les dealers s’acharnent. Mais il le dote d’une aura de mystère palpable et d’une personnalité magnétique. Autour de lui évoluent un toxico minable, des gitans grande gueule, une jolie rousse paumée. Mais les clichés sont balayés par la beauté des silences, le poids des regards et une énergie graphique folle, magnifié par le bluffant travail de couleurs d’Isabelle Merlet. Perriot triture les visages des méchants et lisse ceux des gentils, mais ce n’est jamais gratuit ni facile. Il déforme les grosses cylindrées lancées à 200 km/h, mais ce n’est jamais caricatural. Il se sert du genre polar pour dire quelque chose, quelque chose de fort et complexe, et il use du dessin pour l’exprimer tout en subtilité. Car tous ces partis-pris sont assumés jusqu’au bout, et l’expérimentation visuelle sublime le scénario classique. Et l’ensemble forme un album noir, magique et entêtant, dont on ne sort pas indemne.