Patrice Pellerin, le goût des histoires (la grande et les petites)
C’est un dessinateur réjoui que l’on rencontre dans la salle de réception de l’hôtel de ville de Versailles. Patrice Pellerin et son Épervier s’y voient honorés d’une jolie exposition, retraçant l’épopée de l’aventurier-corsaire au nom de rapace. À 54 ans, l’auteur n’a pas perdu une once de son envie de raconter des histoires, ni de sa passion pour l’Histoire.
Entre le Canada, le port de Brest ou le château de Versailles, il nous embarque dans une intrigue qui sent bon la marée et les coups bas, en suivant la grande tradition de la bande dessinée historique.
Le septième tome de L’Épervier ouvre un nouveau cycle d’aventures pour votre héros. Même si l’on ne se souvient pas des précédents épisodes, on est tout de suite happé par l’histoire…
Ce qui compte, c’est la narration, la façon dont on raconte les choses et sur quel rythme. J’ai appris cela avec Jean-Michel Charlier [scénariste de Blueberry, avec qui il a travaillé sur Barbe Rouge]. Et je suis persuadé qu’un sujet faible bien raconté vaudra toujours mieux qu’un bon sujet mal raconté. De plus, je suis un feuilletoniste, et si je veux intéresser les gens à l’Histoire, il faut que je leur livre une bonne intrigue.
Comment concevez-vous vos scénarios ?
Je pars un peu dans tous les sens : un document que je découvre peut me donner des pistes pour mon histoire, ou alors j’ai une idée de péripétie et je me documente en fonction. Ensuite, quand je dessine un album, je travaille déjà au suivant. Donc, en réalité je suis un peu tout le temps en train de me documenter. Mais je n’arrive pas à écrire mes scénarios dans mon atelier, alors je me consacre à cette tâche quand je suis en déplacement. Dans le train notamment.
Que ce soit le château de Versailles ou le port de Brest au XVIIIe siècle, vos décors comportent beaucoup de détails. Quels modèles utilisez-vous ?
De Brest, il ne reste aujourd’hui rien de cette époque et je n’en ai quasiment trouvé aucune représentation. Je me suis basé sur des plans, qui comportaient certains bâtiments suffisamment bien dessinés. C’est que je passe énormément de temps – parfois des mois! – dans les archives ou les musées, autant par goût personnel que par nécessité. Après, je dois travailler comme un fou pour dessiner l’album. C’est un des problèmes de la bande dessinée historique actuellement : de moins en moins d’auteurs peuvent se permettre de passer deux ans sur un seul tome. Heureusement que mes albums se vendent bien…
Internet n’a-t-il pas changé les choses ?
On trouve beaucoup d’éléments sur Internet, mais je me déplace toujours sur les lieux de mes intrigues. Sinon, je n’aurais pas la sensation de l’espace et ne pourrais pas transmettre mes impressions au lecteur. Par exemple, certains m’ont dit que les scènes du château de Versailles étaient chargées, lourdes, à cause de tous les détails de l’architecture et des costumes. Mais c’était le but ! Le héros étouffe à la Cour et je veux que les gens ressentent les mêmes choses que lui.
Comment écrire des dialogues du XVIIIe siècle réalistes ?
Je ne peux donner qu’une idée du langage, car personne ne sait exactement comment parlaient les Français de l’époque. J’essaie de faire le plus simple possible, aussi parce que mes albums sont tous publics. C’est comme pour le mode de vie et les mentalités de l’Ancien Régime : j’essaie de ne pas trop entrer dans les détails, car je n’ai pas la place de tout expliquer en 48 pages. C’est d’ailleurs un peu frustrant.
Après quinze ans et sept albums de L’Épervier, pensez-vous que votre style a évolué?
Je ne sais pas, car je n’aime pas regarder mes planches une fois que le livre est sorti. Je pense que j’ai partiellement assoupli mon dessin, mais j’aimerais aller encore plus loin. En même temps, à cause de leurs vêtements lourds et peu pratiques, les gens étaient bien raides au XVIIIe siècle ! Par ailleurs, je tente d’introduire de plus en plus d’intentions dans mes cases. J’essaie d’injecter le maximum d’éléments romanesques, notamment par le biais de personnages féminins, et de jouer sur la frustration des lecteurs, en évitant autant que possible les passages obligés. Il faut que j’impose mes propres règles.
Vous travaillez de manière traditionnelle (crayonnés, encrages, couleurs). N’avez-vous pas envie de vous mettre à l’outil informatique ?
Si, j’aimerais bien pouvoir l’utiliser. Il y a d’ailleurs eu quelques retouches de couleurs à l’ordinateur sur le dernier tome. Mais le problème, avec ce type d’outil, c’est qu’il donne la possibilité de sans cesse recommencer. Je me connais, je n’en finirais jamais ! Et puis, je ne pense pas pouvoir me passer du côté sensuel du papier et du bruit de la plume sur celui-ci.
Propos recueillis par Benjamin Roure
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L’Épervier #7.
Par Patrice Pellerin. Soleil/Quadrants, 12,90 €, le 25 mars 2009.
Exposition L’Épervier à Versailles.
Hôtel de ville de Versailles, jusqu’au 10 avril 2009. Entrée libre.
Images © Pellerin/Soleil – Photos © BoDoï
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Bonjour
à noter que Patrice Pellerin a dessiné sept silhouettes grandeur nature et exposées au Château du Taureau dans la baie de Morlaix. Je les ai prises en photos, vous pouvez les voir à cette adresse : http://www.mikael-cabon.com/2009/07/02/le-chateau-du-taureau-dans-la-baie-de-morlaix/
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Bonjour
à noter que Patrice Pellerin a dessiné sept silhouettes grandeur nature et exposées au Château du Taureau dans la baie de Morlaix. Je les ai prises en photos, vous pouvez les voir à cette adresse : http://www.mikael-cabon.com/2009/07/02/le-chateau-du-taureau-dans-la-baie-de-morlaix/
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