Prisonniers du passage
Qu’est-ce que la zone d’attente pour les étrangers arrivant en situation irrégulière dans un aéroport français ? Qui trouve-t-on là-bas ? Comment sont accueillis les migrants ? Qui les aide à faire valoir leur droits, à expliquer qui ils sont et d’où ils viennent, à déposer une demande d’asile ? Quel est le rôle de la police ? C’est un peu tout cela que met en lumière cet album, inspiré de plusieurs années de travail de terrain et de recherche de Chowra Makaremi, anthropologue.
Rien à dire sur la documentation donc, ni même sur l’implication émotive de l’auteure dans ce récit. De courts textes informatifs, à la plume agréable et convaincante, viennent rythmer et appuyer les séquences en BD, qui suivent plusieurs personnages d’immigrés venus d’Afrique ou du Moyen-Orient. Souvent par l’intermédiaire de passeurs qui les ont baladés, maltraités, volés, violés. On apprend donc beaucoup de choses sur ces zones d’attente, même si elles ont changé depuis l’expérience contée ici. Le trait de Matthieu Parciboula, parfois hésitant, fait surtout preuve de retenue, entre réalisme et simplification pour susciter l’émotion, dans un noir et blanc empreint de douceur. Il aide ainsi à faire passer même les séquences les plus brutales. Toutefois, les auteurs, ne donnant qu’un seul point de vue, n’évitent pas un certain manichéisme : les policiers sont montrés comme des fonctionnaires sans recul ni volonté d’écoute, voire pour des tortionnaires, violentant et humiliant les migrants. Des faits de ce genre sont avérés, mais il aurait été plus juste d’expliquer pourquoi et comment les représentants de l’État français en sont arrivés à agir de la sorte. On ne gardera donc de ce volume que sa valeur informative et de véritable alerte sur un lieu méconnu, laissant de côté son parti-pris narratif un peu monolithique.
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