Quand Carlos Giménez était transi d’ « Amor, amor »
L’Espagnol Carlos Giménez a été révélé en France et, selon l’intéressante interview de fin de volume, également dans son pays, par Fluide glacial, qui accueille Paracuellos à partir de 1979. Ces histoires d’enfants tristes dans les orphelinats franquistes dissonent quelque peu dans ce temple de l’humour potache, mais la greffe prend. Giménez devient un pilier de Fluide où il fera paraître Les Professionnels (série plus humoristique, sur le milieu des auteurs BD). L’éditeur publiera aussi directement en recueil son indispensable pavé sur la guerre d’Espagne Les Temps Mauvais, et d’autres titres.
De la moitié des années 80 à celle des années 90, il y distille aussi des planches sans réelles connexions, si ce n’est quelques histoires où un personnage d’écrivain peut se retrouver, de loin en loin. Avec un humour mordant, il n’abandonne pas son goût du récit social et décrit des relations amoureuses et sexuelles sous toutes leurs formes, et surtout les moins nobles : tromperie, hypocrisie, querelles de machos… Il aborde aussi sans fard la prostitution ou le sida, alors tabou absolu. Pour lancer cette nouvelle séquence dans son travail, et puisqu’il s’agit de briser des conventions, il va la débuter par un récit de 17 pages, quasiment un quart du magazine ! La proposition improbable paraît dans le n° 96 de mars 1984 sous le titre Un jour, quelque part, un rendez-vous…
Cette série paraît par intermittence, se démarquant par un sens du dialogue ciselé et souvent hilarant, entre les menaces improbables à propos d’un mari jaloux à l’avocat pervers dont la femme de ménage saura se venger en passant par la honte du « puceau » dans la cour du lycée. Elle est réunie dans deux albums, sous le titre Amor, amor !!
Cette intégrale réunit les deux tomes parus en 1991 et 1996, accompagnés d’une petite interview de l’auteur, revenant sur son arrivée dans Fluide et le ton des histoires ici réunies. Quelques mois plus tard, un tome 2 de l’intégrale est sorti, reprenant cette fois les trois tomes d’Aux risques de l’amour (qui se construisait plus où moins sur le même principe) et des inédits en France. Une publication massive de Giménez qui fait plaisir à voir, la lecture de l’auteur rappelant qu’il a un ton unique et est réellement majeur, quoiqu’encore sous-estimé.
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Amor, amor, l’intégrale.
Par Carlos Giménez.
Fluide Glacial, 114 p., 19,90 €.
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