Où s’arrêtera Red Ketchup ? Après avoir dépassé les frontières du temps dans ses précédentes aventures (Le Couteau aztèque), il franchit celles de la mort et se retrouve en enfer, reçu par Lucifer en personne, et avec tous les honneurs. L’agent fou du FBI entreprend aussitôt de remettre de l’ordre chez les démons. À tel point que ceux-ci fuient l’enfer et se répandent dans notre monde… Pendant ce temps, Sally Ketchup, la sœur de Red, refuse de croire à sa mort et remue mue ciel et terre pour le retrouver.

Ce huitième opus des aventures du rouquin fou est un très bon cru. L’association Réal Godbout/Pierre Fournier, têtes de file de la renaissance de la BD québécoise dans les années 1980,  est toujours aussi efficace : le scénario est foisonnant sans qu’on s’y perde, bourré d’action et d’idées jubilatoires – comment les démons s’intègrent à notre société, à l’heure de la politique spectacle et de la mondialisation. Le dessin est riche, précis, la maîtrise de la mise en scène épatante à chaque case. Et la culture des auteurs se lit dans les nombreuses références historiques, politiques, littéraires : les curieux reconnaîtront  par exemple les différentes formes d’entités maléfiques issues des civilisations égyptiennes, mésopotamiennes, occidentales… ou de fines allusions cachées à Hergé !

La seule limite à Red Ketchup est finalement… Red Ketchup lui-même : monolithique et borné, il peine à susciter l’intérêt. Les auteurs ne s’y trompent pas, en choisissant de décaler le projecteur sur sa sœur Sally (déjà très présente dan l’album précédent), dont le caractère présente davantage de facettes. Dernière bonne nouvelle : le projet d’un film autour du personnage de Red Ketchup, dont on parle depuis plusieurs années, se concrétise. Le cinéaste québécois Martin Villeneuve travaille avec les auteurs sur un scénario qui mettrait leur héros en scène dans une aventure inédite. Alléchant !