Osamu et sa soeur Akiko sont orphelins, et élevés par leur grand-mère. Quand la seconde peaufine ses vidéos de tuto maquillage pour les réseaux sociaux, le petit frère s’isole et dialogue avec des yokai, ces créatures surnaturelles du folklore japonais, qu’il est le seul à voir. Mais quand leur mamie décède, c’est tout leur petit monde qui s’écroule. Ils vont devoir déménager à Tokyo. Mais ils refusent que les cendres de leur aïeule ne soient pas déposées sur l’autel familial, dans son village natal, qui se situe en pleine zone interdite après l’accident nucléaire de Fukushima. Qu’à cela ne tienne, les enfants s’enfuient et tracent leur route vers la campagne irradiée…

Laurent Galandon (A fake story, Retour de flammes, L’Appel…) relève ici un double défi : mêler des éléments réalistes et documentés avec le registre fantastique, et aborder un sujet politique et écologique grave à travers une aventure à hauteur d’enfants. Mission accomplie, car son scénario prend le parti de l’émotion mais sans pathos, dans un esprit proche des fresques animées d’un Miyazaki par exemple, tout en conservant une sobriété et une humilité remarquables. Dès lors, à travers le regard de ses deux enfants traumatisés, et qui ne vivent pas le deuil et la résilience de la même manière, l’auteur peut montrer la catastrophe sous différents angles, et laisser la parole à l’humain, sans jamais oublier de brosser une aventure excitante, où la nature sauvage aura sa part. Le dessin de Michaël Crouzat, venu de l’animation, est tout à fait à la hauteur de l’enjeu : vif, limpide, efficace et doté d’ambiances convaincantes, et aussi de yokai au design réussi. Voilà donc un bel album, intelligent et original, tout à fait accessible pour les jeunes lecteurs dès 11 ans.