Riad Sattouf filme d’hilarants Beaux Gosses
Tout de suite, Riad Sattouf met les choses au point. Non, son film n’est pas l’adaptation de Retour au collège, mais se base sur un scénario original, qu’il a co-écrit avec Marc Syrigas. Et, avec Les Beaux Gosses, le géniteur de Pascal Brutal met dans le mille : frais, juste et terriblement drôle, son premier long-métrage a été sélectionné pour la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. Il dépeint le quotidien d’adolescents en pleine montée d’hormones, à un âge ingrat où embrasser une fille et glisser ses mains sur son corps tient du nirvana. Entretien – réalisé au Festival de Bastia – avec un trentenaire nerveux, mais gagné par le virus du cinéma.
Comment êtes vous passé du 7e art au 9e art ?
J’ai été contacté en 2006 par la productrice Anne-Dominique Toussaint, qui voulait adapter Retour au collège. Or je préférais un film tiré d’une autre histoire. Il me semblait plus rigolo et intéressant de ne pas refaire ce que j’avais déjà fait et de partir de zéro. De toute façon, on n’imagine pas une bande dessinée de la même manière qu’un long-métrage.
Mais vous a-t-on proposé dès le départ de réaliser vous-même le film ?
Non. C’est moi qui ai dit à la productrice que je passerais volontiers derrière la caméra. Ça ne lui a pas fait peur ! À l’époque, pourtant, Marjane Satrapi n’avait pas encore terminé Persepolis et Joann Sfar ne s’était pas encore attaqué au cinéma. J’ai fait des études de cinéma d’animation, et j’avais depuis un moment le fantasme de réaliser un long-métrage. Seulement, je n’aurais jamais osé faire les démarches moi-même, ç’aurait été trop épuisant…
Comment avez-vous procédé ?
J’ai d’abord écrit une première version seul, avant de la reprendre avec un copain, Marc Syrigas. Concernant la réalisation, j’ai demandé conseil auprès d’Alain Monclin, qui fut mon professeur de mise en scène aux Gobelins. Il m’a donné en quelque sorte des cours privés, m’a aidé à comprendre comment donner du sens à une scène, renforcer mes propos ou jouer avec l’optique. Cela m’a aidé à changer d’esprit par rapport à la BD. Le tournage a eu lieu entre juin et août 2008, à Rennes et Gagny en Seine-Saint-Denis.
Quelle vision aviez-vous du film ?
Je souhaitais partir des comédiens, de leur corps, de leur sensualité. Je leur ai laissé une grande part d’improvisation. Les scènes étaient écrites, certes, mais je voulais qu’ils soient les moins crispés et coincés possible. J’ai tenté de m’adapter constamment aux situations pour arriver à un cinéma très souple, sans carcan. Mon but était de capter la vérité de l’adolescent, sans être naturaliste pour autant. Je n’ai pas opté pour une caméra à l’épaule, qui aurait donné un rendu hyperréaliste. Mon cinéaste préféré est Fellini, qui n’a jamais tourné de film réaliste.
Qui est votre héros ?
Il s’appelle Hervé, a 14 ans et vit seul avec sa mère. Il évolue avec une bande de potes malingres, ultra-féminins et craintifs. Et commence doucement à oser aller vers les filles. Il y en a une en particulier qui s’intéresse à lui. Mais comme elle est jolie et plutôt intelligente, Hervé ne comprend pas ce qu’elle lui veut… Je me suis concentré sur les petits comportements bizarres des collégiens, les émotions masculines. Je suis fasciné par les adolescents, leur détresse à un moment où l’enfance se termine, où la nature les oblige à changer. Être en contact avec eux, en chair et en os, était pour moi un aboutissement. J’avais la sensation de trouver leur vraie matière. J’ai beaucoup utilisé leur personnalité et leurs attitudes, souvent étonnantes. À cet âge, une fille peut se mettre à pleurer puis rigoler deux secondes plus tard !
Quelle est la part autobiographique de ce film ?
Elle n’est pas notable. Je n’ai pas été un adolescent exceptionnel, ni dans un sens, ni dans un autre. Ni geek, ni star. Je n’étais ni bon, ni nul en classe, et ne m’identifiais à aucune tribu particulière. Je n’ai pas l’impression d’avoir fait de crise d’adolescence. Enfin peut-être sur le tard, en devenant auteur de BD…
On rit beaucoup en regardant Les Beaux Gosses…
C’est une comédie, mais je ne souhaitais pas provoquer des rires de moquerie. Je voulais montrer à quel point ces ados sont beaux et touchants, même avec leurs défauts.
D’autres projets au cinéma ?
Ce tournage a été une expérience puissante, j’ai adoré travailler en équipe. Toutes ces énergies tendues vers le même but apportent une certaine griserie. Si jamais je pouvais tourner un autre film dans ces mêmes conditions, en choisissant mes comédiens et sans grande contrainte, je serais partant pour un autre.
Et en bande dessinée ?
Je continue Pascal Brutal, et j’ai quelques autres albums en cours. Une histoire de science-fiction assez mystique pour L’Association, et un diptyque sur l’homme arabe pour Hachette Littératures.
Propos recueillis par Laurence Le Saux
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Les Beaux Gosses
Un film réalisé par Riad Sattouf.
Avec Vincent Lacoste, Anthony Sonigo, Alice Trémolières, Noémie Lvovsky, Emmanuelle Devos…
Durée : 1h30. En salles le 10 juin 2009.
Images © Les Films des Tournelles – Photo © Leïla Garfield
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Ce film a vraiment l’air « cooly cool » !
(comme je dis souvent) -
Ce film a vraiment l’air « cooly cool » !
(comme je dis souvent)
Commentaires