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Richard Corben, Grand Prix d’Angoulême 2018

24 janvier 2018 |

Le Grand Prix 2018 du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême revient donc à Richard Corben.

© Dona Corben

© Dona Corben

Choisi par les auteurs de BD professionnels, Richard Corben devance au 2e tour de vote Chris Ware et Emmanuel Guibert. L’auteur américain de 77 ans sera donc honoré l’an prochain, pour le 46e Festival d’Angoulême – un défi, car le Festival comptait lui consacrer une large expo une ou deux années plus tard…

Les auteurs votants ont donc choisi un spécialiste de la BD dite de genre – horreur, fantastique, SF – qu’il aborda notamment dans les revues Eerie et Creepy. Un grand amateur d’Edgar Poe, qu’il a plusieurs fois adapté, et un dessinateur un peu en marge du système des grandes maisons d’édition américaines. Du moins, jusqu’au moment ses finances en décident autrement. « Ma conversion aux comics grand public s’est faite à un moment de ma carrière où je n’avais plus de succès, confiait-il à Stéphane Beaujean et Frédéric Poincelet, en 2013 pour le magazine Kaboom. Ma propre maison d’édition, Fantagor Press, partait en banqueroute et je n’avais plus aucune ressource pour subvenir à ma famille. » Des histoires courtes de Batman, puis des récits pour le label Vertigo de DC Comics, et ainsi de suite. « Au bout d’un moment, je dois reconnaître que mon style n’est pas très adapté à ce registre. Mais j’étais très content de pouvoir m’appuyer sur cette ressource et compter sur la gentillesse de certains éditeurs alors que j’étais en difficulté. »

Mais Richard Corben, auteur de la saga de Den notamment, est surtout un dessinateur audacieux. « Le dessin m’est toujours apparu plus spontané que l’écriture, soutenait-il dans le même entretien. Non pas que je me sente plus doué, mais plus à l’aise. C’est la manière la plus naturelle que j’ai de m’exprimer. (…) Mon dessin mue pour épouser mes changements de points de vue, et j’ai bien du mal à en extraire une analyse. Seul mon objectif, peut-être, reste constant : la recherche d’un mélange de simplicité et d’intelligibilité, teinté parfois de subtilités. » Il n’hésitait pas à expérimenter divers procédés de superposition ou de mise en couleurs pour se démarquer. « Chacun de mes livres doit justifier d’au moins un défi graphique. Ou de quelque chose que je ne peux concrétiser sans un surcoût de sueur et de travail. » Quant à l’ordinateur dont il s’est emparé assez vite : « Pour un artiste comme moi qui dessinait avant son apparition, je peux vous dire que personne n’aurait pu imaginer un outil capable de vous faciliter la vie à ce point. »

creepy2

ragemoor-comics-volume-1-tpb-hardcover-cartonnee-80084Autre réponse intéressante de l’auteur, concernant son livre Ragemoor : « J’avais, dès les prémices, décidé de faire cet album en nuances de gris. J’avais vraiment besoin de ce sentiment que seule cette esthétique particulière peut créer. Mais les éditions Dark Horse insistaient pour que je le réalise en couleurs ; le noir et blanc se vend mal chez eux. Mais j’étais arc-bouté sur ma vision artistique et prêt à annuler le projet si je ne pouvais pas le réaliser dans les conditions que je m’étais fixées. Ils ont plié et le livre a connu un échec commercial. C’est ainsi. Dessinateurs et scénaristes n’ont, d’ordinaire, jamais le dernier mot face à la prévalence des choix commerciaux sur l’artistique. Mais j’en étais arrivé à un point de ma carrière où je ne voulais plus jamais transiger avec ma vision créative. »

C’est donc un auteur atypique, au design puissant et à la carrière riche (et en montagnes russes) qui sera célébré Angoulême l’an prochain. Chouette, non?

Et bonne nouvelle, les éditions Delirium ont lancé un financement participatif pour l’édition de Grave de Corben, pleine d’inédits.

Pour en savoir plus sur la vie et l’oeuvre de Richard Corben, rendez-vous ici.

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