Sangsues #1
Yoko n’a plus d’existence sociale. Armée d’un trousseau de clés, elle s’introduit chez vous pendant votre absence, discrète, invisible. Elle est une “sangsue” qui glisse d’un appartement à l’autre et vit au crochet de ses hôtes. La jeune fille n’est pas un cas unique. À l’écart du monde visible existe un microcosme parallèle, caché et périlleux, qu’elle va découvrir à ses dépens…
Au départ, Sangsues se situe à la croisée des longs-métrages Locataires de Kim Ki-duk et Tokyo Sonata de Kiyoshi Kurosawa, brossant le portrait d’une marginale que rien ne distingue, de l’extérieur, des autres habitants de la fourmilière urbaine. Daisuke Imai nous montre une société d’anonymes, de repli sur soi, où personne ne connaît jamais vraiment son voisin, parce que protéger les apparences est la priorité. Son héroïne Yoko est attachante, bien écrite, et c’est avec curiosité que nous plongeons dans son quotidien insolite, tout en brûlant de connaitre les raisons qui l’ont menée à ce mode de vie. Un début extrêmement prometteur, donc, porté par un joli dessin tout en aplats. Cependant, arrivé à la moitié du volume, la peinture de société au rythme tempéré se mue en chasse à l’homme où le temps joue contre une Yoko en mauvaise situation ! Car les autres “sangsues” sont des individus dangereux, très dangereux, en plus d’être tellement caricaturaux – le dur à cuire ténébreux, le sadique à l’allure simiesque, la mystérieuse autoritaire – qu’ils ébranlent la crédibilité d’un monde jusque-là vraisemblable. Cette adjonction de violence et d’extravagance était-elle nécessaire ? La question se pose, tant le virage est abrupt. Malgré cette légère déconvenue, Sangsues reste un titre séduisant, sans réel équivalent, dont nous suivrons l’évolution avec intérêt (cinq tomes sont prévus).
© Daisuke Imai 2011 / SHINCHOSHA PUBLISHING CO.
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