Séries jeunesse : huit suites au banc d’essai
Séries qui débutent, qui durent, qui confirment, qui se renouvèlent ou qui s’enlisent : que valent les suites des séries jeunesse qui avaient su nous séduire au premier tome ?
Harmony #2 – Indigo
Par Mathieu Reynès. Dupuis, 12 €, le 2 septembre 2016.
Un huis clos étouffant, une amnésie mystérieuse et partielle, des pouvoirs surnaturels, le premier tome de la série Harmony a laissé entrevoir une intrigue complexe tout en faisant planer un épais brouillard autour de cette adolescente perdue et sans repères. Cette suite ramène les lecteurs 6 ans en arrière et lève le voile sur les origines du mystère. On découvre le professeur Torres, un scientifique embarqué dans des recherches pas tout à fait habituelles. On comprend rapidement que son travail était voué à trouver un remède pour sa fille, malade, qui vient malheureusement de mourir. Au centre de ce drame se tient Harmony. Quel rôle a-t-elle joué dans ces expériences ? On ne le sait pas encore, mais les liens qu’elle a noués avec Torres sont certainement la clé de l’énigme. Rythmé et soigneusement séquencé, un découpage millimétré, un dessin précis, des personnages qui captent l’attention, l’album fait preuve d’une grande maîtrise scénaristique et graphique. Mathieu Reynès réussit à captiver le lecteur à qui il dévoile l’intrigue pas à pas, ni trop vite, ni trop lentement, avec un timing géré à la seconde près. Peut-être un peu trop parfois, c’est ce qu’on peut lui reprocher, un excès de rigueur qui rend l’album un peu froid par moments. Le troisième opus de ce triptyque est annoncé pour 2017.
Magic 7 #2 – Contre tous
Par Kid Toussaint, Rosa La Barbera et Giuseppe Quattrocchi. Dupuis, 9,90 €, le 26 août 2016.
Ils sont 7, ils sont encore au collège, mais ils sont voués à un destin hors du commun. Tous possèdent un pouvoir magique unique, libéré par un sage, il y a de cela plusieurs générations. Séparés ils ne sont et ne peuvent rien, ensemble, ils vont devoir sauver le monde. Mais pour le moment, cette équipe d’apprentis magiciens n’est pas encore au complet, seulement 5 d’entre eux se sont rencontrés. Il va donc falloir mettre la main sur les chaînons manquants. Dans ce deuxième tome, on n’en apprend guère plus sur le mystère qui plane au-dessus de la tête de ces adolescents dotés de pouvoirs extraordinaires. Ils ont bien du mal à découvrir ce qui les attend, tout comme le lecteur qui est promené durant tout l’album dans des péripéties un peu décousues et manquant de clarté. Les bonnes impressions laissées par le premier tome se dérobent assez vite, la faute à un récit qui manque de liant et qui saute trop souvent d’une séquence à une autre de manière un peu brutale. Au final, on a du mal à suivre l’ensemble des protagonistes et on n’a pas vraiment l’impression d’en découvrir plus sur eux. Le dessin est parfois lui aussi un peu brouillon et confus. Le troisième tome permettra peut-être de redresser la barre… ou pas !
Dad #3 – Les nerfs à vifs
Par Nob. Dupuis, 10,60 €, le 2 septembre.
Il aura fallu moins de 2 ans, et déjà 3 albums, pour que Dad s’installe tranquillement parmi les séries « tout public » qui font parler d’elles. Il y a certes dans cet univers une petite coloration jeunesse, mais ce joyeux papa ours et ses 4 filles ont réussi à conquérir un lectorat qui va bien au-delà du jeune public. Il faut dire que Nob connaît la recette qui fait d’une bande dessinée, un succès. Il a déjà eu l’occasion de la tester avec ses séries Mamette et Grompf. Avec Dad, il est dans un registre humoristique qui fonctionne sur plusieurs niveaux, et toutes les générations peuvent s’y retrouver. Les plus grands s’amuseront notamment à dénicher les nombreux clins d’oeil musicaux et culturels que le dessinateur ne peut s’empêcher de cacher dans les décors de ses histoires. Sans vraiment que l’on y fasse trop attention, on retrouve aussi dans ces courts récits de nombreux sujets de société comme l’égalité homme-femme, l’éducation, le chômage ou encore le stress, qui sont abordés avec subtilité et légèreté. Contre la morosité et les baisses de moral qui émaillent parfois le quotidien, une petite dose régulière de Dad permet de retrouver le sourire et de relativiser ! Dad, c’est bon pour le moral.
Hôtel Étrange #6 – Le Noël des Sombrelines
Par Florian Ferrier et Katherine Ferrier. Sarbacane, 12,50 €, le 5 octobre 2016.
L’hiver est déjà de retour à l’Hôtel Étrange et avec lui reviennent également toutes les activités de saison, plus ou moins réjouissantes et passionnantes. C’est par exemple à cette période que Célestin se faufile dans la forêt pour donner un petit coup de main aux Sombrelines afin de leur permettre de rejoindre sans encombre la vallée d’à côté. Là-bas, où le temps est plus clément, elles pourront récolter des graines qu’elles rapporteront à la belle saison. Mais cette année, le facétieux Kaki fait parti de cette expédition et avec lui, rien ne se passe comme prévu. Marietta et ses amis vont se retrouver avec un bébé Sombrelines sur les bras et il va falloir l’aider à retrouver ses aînés. La petite série de Katherine et Florian Ferrier égraine les albums au fil des saisons avec toujours la même douceur et candeur. Les chemins de cette forêt enchantée continuent de nous faire découvrir de nouvelles créatures à chaque histoire et ce petit univers s’épanouit paisiblement, fidèle à lui-même.
Monsieur Blaireau et Madame Renarde #6 – Le Chat sauvage
Par Brigitte Luciani et Ève Tharlet. Dargaud, 16,45 €, septembre 2016.
C’est l’effervescence dans la forêt, Sylvestre le Chat sauvage, le célèbre acrobate, va se produire en spectacle dans la clairière. Les enfants de Monsieur Blaireau et Madame Renarde sont tout excités à l’idée d’approcher leur idole. Mais pour Roussette, la rencontre avec son artiste préféré ne va pas se passer comme elle aurait pu l’imaginer. Arrogant et moqueur, le félin va tourner en ridicule la petite renarde. Humiliée et attristée, Roussette va tout remettre en question, son mode de vie, sa personnalité et son identité ! Elle va même fuir son foyer, peut-être pour mieux se retrouver ? Brigitte Luciani et d’Ève Tharlet livrent ici le sixième album de cette série jeunesse qui, au fil des sorties, à su conserver les ingrédients qui en font une vraie petite bulle de douceur particulièrement adaptée aux plus jeunes lecteurs. Pleine de bons sentiments, elle aborde de manière détournée et avec la distance qu’il faut, des sujets importants qui concernent le quotidien des enfants. Ces derniers pourront facilement s’identifier et se projeter dans ces aventures, pour se divertir et aussi un peu grandir. Pour les plus petits, l’entrée dans cet univers peut se faire grâce au spin-off Cassis, qui est un excellent marche-pied pour entrer dans le monde de la lecture.
Anuki #6 – La Grande Course du printemps
Par Frédéric Maupomé et Stéphane Sénégas. Les éditions de la Gouttière, 10,70 €, septembre 2016.
Dans le village d’Anuki, c’est bientôt l’heure de donner le coup d’envoi de la grande course du printemps. Les petits guerriers plumés sont affûtés, prêts à en découdre et ils trépignent d’impatience. Qui sera le plus rapide, le plus agile et le plus endurant cette année ? On le saura bientôt ! Mais à la surprise générale, les participants vont devoir composer avec un concurrent inattendu. Enfin, plutôt une concurrente. En effet, la petite Nuna est elle aussi sur la ligne départ et elle semble bien décidée à damer le pion de tous ces garçons. Trois, deux, un, partez ! La grande aventure continue avec Anuki, de Stéphane Sénégas et Frédéric Maupomé. Dans ce nouvel album, on ne trouve toujours pas de bulles et encore moins de textes. Pour pouvoir être lue et comprise par les enfants qui ne maîtrisent pas encore la lecture, toute l’histoire se raconte en images avec une grande fluidité et beaucoup d’énergie. Les auteurs nous démontrent encore une fois que la bande dessinée muette est réellement un genre à part entière avec ses codes et ses spécificités. Anuki, comme Petit Poilu ou encore Myrmidon, rendent le neuvième art accessible aux plus jeunes, et rien que pour cela, on leur tire notre chapeau.
Akissi #7 – Faux départ
Par Marguerite Abouet et Mathieu Sapin. Gallimard, 10,50 €, octobre 2016.
C’est la panique à Yopougon. Les parents d’Akissi se sont mis en tête d’envoyer leur fille rejoindre un vieil oncle qui vit à Paris depuis plusieurs années. Pour la fillette, c’est un drame, elle ne s’imagine pas quitter aussi brutalement ses amis, sa famille et son quartier, surtout pour aller vivre dans un pays qu’elle pense envahi par les loups et où il fait tellement froid que le pipi gèle ! Pour déjouer ces plans machiavéliques, Akissi et ses amis vont sortir de leurs boubous leurs plus belles bêtises, et pour ça, vous commencez à les connaître, ils ne manquent pas d’imagination. Ça promet des après-midi agitées dans les rues animées d’Abidjan ! Marguerite Abouet continue de puiser dans ses souvenirs pour nous exposer avec bienveillance une jeunesse africaine pleine de vie, de ressources et d’espoirs. On se balade avec toujours autant de plaisir dans ces quartiers colorés croqués par Mathieu Sapin. On sourit et on se rend complice des joyeuses facéties que ce duo nous fait découvrir. Cependant, ce septième tome ressemble à une transition pour cette série qui cherche un peu son second souffle. La suite nous dira s’il y a encore matière à continuer à s’enthousiasmer pour Akissi et ses amis, mais sur ce point, on n’a que très peu de doutes !
Ernest & Rebecca #7 – Il faut sauver Monsieur Rébaud !
Par Guillaume Bianco et Antonello Dalena. Le Lombard, 10,60 €, le 26 août 2016.
Du haut de ses 6 ans et demi, bientôt 7, la petite Rebecca continue de foncer tête la première dans le grand tourbillon de la vie. Cette fois-ci, avec Ernest, le plus fidèle des microbes de compagnie, elle est bien décidée à mener la vie dure à Mademoiselle Bello. Cette nouvelle maîtresse vient tout juste de débarquer dans sa classe pour remplacer le pauvre Monsieur Rébaud, mis à pied par sa hiérarchie à cause de ses méthodes un peu trop insolites. Tout cela laisse augurer des situations assez cocasses et surtout pas mal de soucis en perspective pour la fillette ! On ne présente plus cette série tendre et touchante qui enchante les petits lecteurs depuis plusieurs années maintenant. Ce septième tome paraît cependant un peu moins personnel et Guillaume Bianco emprunte quelques chemins étonnants qui laissent perplexe parfois. Reste que l’ensemble est toujours aussi vivant et sympathique à lire. Antonello Dalena continue de mettre en scène avec brio cette bande de copains pleins de vie et toujours prêts à dégainer la boîte à bêtises. Des bêtises et des copains, il en sera d’ailleurs question dans le prochain tome de la série. Vite !
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