Par Yann Tisseron et Mathieu Mariolle. Drugstore, 13,90 €, le 15 septembre 2010.

On peut produire des bandes dessinées de divertissement sans prendre ses lecteurs pour des imbéciles. Offrir du suspense et du grand spectacle, tout en tissant une intrigue complexe sur fond d’événements historiques authentiques. C’est ce que démontre ce premier tome de Shanghaï, qui met en scène mafieux violents, empereur revanchard, artiste de cirque audacieuse, contrebandiers français, dans une Chine du début du XXe siècle, courbant l’échine devant l’opium et les puissances étrangères.

Dans ce tumulte, on est un parfois un peu perdu, en raison d’une mise en scène sans temps mort, qui va et qui vient entre une enquête autour de la disparition d’un horloger et la curieuse quête d’une enfant de la balle pleine de secrets. Mais qu’importe si on ne capte pas tout immédiatement (les explications arrivent, ne vous inquiétez pas) : la force de ce premier volume réside dans ses personnages, ses deux figures féminines fortes et mystérieuses, la tueuse numéro un des triades face à une fidèle de l’Empereur. Mathieu Mariolle (Smoke City, Nuisible) sait doser la magie, l’action et le fond historique sérieux, les protagonistes complexes et les situations improbables. Pour dessiner cet univers aux accents légendaires, un nouveau venu : Yann Tisseron qui, aidé au storyboard par Mikaël Bourgoin (Le Codex Angélique #3), laisse entrevoir une grande maîtrise des techniques numériques, notamment dans les textures et les effets de lumière et de fumée. Un style éclatant, mais qui donne parfois la désagréable impression d’être un peu flou. Néanmoins, il ne faut pas s’arrêter à ce parti-pris graphique, et tout simplement se laisser emporter par le souffle de l’aventure.

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