Snapdragon vit dans un village de mobile-homes et ne cesse de se faire moquer à l’école. Qu’importe, elle se veut aussi solide que sa mère – célibataire et pompier qui accumule les heures supp’ – et on ne peut plus téméraire : elle va affronter son appréhension et aller à la rencontre de cette étrange dame toute en noire, qui vit dans les bois et que tout le monde surnomme, évidemment, la « sorcière ». Elle va alors découvrir une amie et de nouveaux centres d’intérêts, peut-être même un peu magiques…

L’Américaine Kat Leyh propose ici un excellent roman graphique pour jeune public, qui sort des sentiers battus et brouille volontairement les cartes dès le début. Des virées à vélo en fin d’après-midi, des soirées films d’horreur à la maison, une horrible sorcière qui hante le voisinage ? Voilà qui fleure bon les Goonies dans les premières pages. Mais l’autrice prend le contrepied et écarte dans un premier temps les aspects fantastique et aventure pour se concentrer sur l’apprentissage de la confiance – en soi et dans les autres – de la fougueuse mais solitaire Snapdragon, au sein d’une belle histoire d’amitié et de tolérance. Ainsi, la sorcière est une vieille dame qui s’occupe des animaux – vivants ou morts – et qui aimait une femme à une époque où c’était trop mal vu. Son meilleur ami est un jeune black tout en rondeurs, qui finit par oser faire ce qu’il aime : porter des robes et des boucles d’oreille. Et elle, dans une Amérique des rejetés, des petites gens des trailers parks, elle trouve sa voie, dans les pas d’une maman formidable, modèle d’indépendance et d’ouverture au monde. Là dessus, pas de problème pour ajouter une petite couche de magie, histoire de faire du bien, au sein de planches au graphisme et au découpage pêchus.

Voilà donc une bande dessinée américaine enlevée et bienveillante, parfaitement en phase avec la jeune génération actuelle, à mettre entre toutes les mains, comme Le Garçon Sorcière ou Le Prince et la couturière.