Sous les galets la plage
En ce mois de septembre 1962, les côtes bretonnes se vident de leurs touristes. Ne restent les locaux et les fils de bonne famille, ceux qui attendent oisivement la rentrée universitaire, en vidant la cave de leurs parents. Albert, Francis et Édouard sont de ceux-là, et rencontrent un soir Odette, à peine plus âgée qu’eux mais bien plus délurée. Les trois garçons n’ont jamais connu de femme, et ils se laissent mener par le bout du nez par la nouvelle venue, qui fait en réalité partie d’une bande de cambrioleurs à tendance révolutionnaire…
Pascal Rabaté compose ici une histoire d’amour, de rêve et d’émancipation, au tournant d’une décennie décisive pour l’Europe, qui allait se conclure en France par Mai-68. Il imagine la confrontation, brutale puis sensuelle, entre la bourgeoisie installée (un fils de militaire appelé à prendre la suite de son colonel de papa) et une jeunesse aspirant à la délester de ses biens superflus. Révolutionnaires engagés ou vrais escrocs prônant un idéal communiste comme excuse à leurs méfaits ? L’auteur de La Déconfiture répond avec nuances en fonction des personnages, ce sera tantôt la première solution, tantôt la seconde. Mais surtout, il convainc par la sobriété de son intrigue et de ses effets, croquant avec malice et tendresse son couple de héros. Et brossant, avec ce qu’il faut de légèreté et de sérieux, un portrait social d’une époque et de ses fractures, qui fait immanquablement écho aujourd’hui, à l’heure où les divisions entre riches et pauvres se creusent, où l’intolérance et la violence explosent comme seule expression de la détresse. Pascal Rabaté choisit le camp de l’amour et de l’espérance, et d’égratigner comme il faut – même si c’est un peu facile – les tenants d’institutions étroites d’esprit. Ça fait toujours du bien.
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