Sunny #1
Auteur de chefs-d’œuvre (Printemps bleu, bouleversant) comme de puissants somnifères (Number 5, la face sombre du mot «onirique»), Taiyou Matsumoto compte parmi les mangakas les plus imprévisibles de sa génération. Il se réinvente continuellement, change son graphisme, ses codes narratifs. Et garde une sensibilité à fleur de peau, d’une série à l’autre, ainsi que d’obsessionnels motifs récurrents. Déjà essentiel dans son œuvre majeure Amer Béton, l’enfant abandonné est l’un de ces motifs. Il forme le cœur de Sunny, quotidien d’un orphelinat dans le Kansai des années 1970.
À 46 ans, Matsumoto caresse ses blessures d’enfance. Car sa jeunesse l’inspire lorsqu’il croque ce foyer, ce centre pour enfants forcés de grandir sans parents. Une touchante authenticité vit en chacune des pages, toujours marquées – même dans les moments heureux, même lorsqu’on veut l’oublier – d’une tenace mélancolie. Vivantes, délicates, ces planches portent les sentiments complexes qu’éprouve l’orphelin, figurés par un dessin aussi pudique que tourmenté, composé de lignes instables et de profonds lavis (évoquant GoGo Monster en plus flottant, une approche moins insolite que celle du Samouraï Bambou). Entre sourires, candeur et amertume, chaque enfant incarne cette condition à sa manière et garnit un chapelet de résidents aux caractères marqués… sans oublier l’objet de tous les possibles, carcasse de fer et personnage à part entière : la Sunny, une vieille voiture plantée dans un terrain vague où tous se retrouvent en cachette.
Très attendu, Sunny n’offre pas la pièce maitresse que l’on espérait, pour l’instant. Si le récit s’ouvre sur l’arrivée d’un nouveau pensionnaire, c’est en fait le seul événement marquant d’un tome légèrement frustrant qui, coincé en statu quo, se consacre à l’introduction des personnages. Il faudra donc attendre quelques développements supplémentaires pour dresser le bilan de cette jolie bande dessinée intimiste qui se révèle, jusqu’ici, «seulement» très prometteuse.
SUNNY © 2011 Taiyou MATSUMOTO/SHOGAKUKAN
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puissant somnifère number 5 c dur !!
contemplatif certes … -
Assurément le plus grand auteur de mangas contemporain.
Je suis très impatient de lire Sunny. Number 5, Amer Béton, Gogo Monster sont des chef d’oeuvres magnifiques. Ping Pong réussi même à être trépidant malgré sa thématique.
Il est vrai que Number 5 peut surprendre et perdre certains lecteurs, mais à ceux qui ne connaissent pas jetez vous sur Amer Béton : un classique, accessible et brillant.
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Sunny est ce que j’ai lu de plus émouvant depuis très longtemps. Les volumes suivants sont des merveilles. Ce n’est bien sûr pas très grand public de raconter le quotidien d’enfants plus ou moins abandonnés par leurs parents. Je ne sais pas si la traduction rend très bien le jeu sur le langage qui trahit les origines des gamins. Je viens de terminer la lecture du cinquième volume et c’est toujours aussi bouleversant.
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